Publifarum n° 20 - Lire le roman francophone. Hommage à Parfait Jans (1926-2011)

La ligne bleue : le roman et ses frontières entre l’exil et la tradition

Rosanna GORRIS CAMOS



Le prisme du roman

Si le roman est une sorte de prisme reflétant les diverses facettes du monde et de la société et si, après les années 1980, le roman est revenu au récit, à une écriture qui aspire à représenter le sujet agissant sur la réalité et dans l’histoire,1 les littératures francophones ont su exploiter ce retour à la réalité et à l’histoire et englober dans ce genre les inquiétudes identitaires, les aspirations et les rêves des Pays qui les ont engendrés. Le roman permet surtout de magnifiques plongées dans l’histoire à la recherche des origines mythiques et identitaires et instaure une coexistence fructueuse entre innovation et tradition2 non sans contradiction et sans difficulté. Souvent le roman sait en effet enregistrer le malaise vis-à-vis de l’irruption de nouveaux modèles socio-économiques dominés par la globalisation, par l’exploitation, par le non respect des identités et des traditions autres.3 Le roman francophone est enrichi et mis à l’épreuve par la contamination de genres paralittéraires (roman policier, roman d’aventures, roman d’espionnage, science-fiction…), par l’ironie, mais a su englober et transformer ces genres venus d’ailleurs et les plier aux exigences et aux caractéristiques propres à chaque littérature. La vogue du polar et du fantastique en sont un exemple frappant. Le progrès, la société de consommation sont souvent perçus comme des menaces et le roman redevient un instrument de dénonciation, de mise en cause des tourments et des angoisses de la modernité. La reprise de schémas du roman historique représente aussi un recours au passé et notamment au passé le plus douloureux de l’histoire de chacun pour comprendre le présent. Si le roman est un genre perméable pour toute littérature, pour les auteurs francophones le roman devient une sorte d’abri aux tempêtes du monde, mais aussi le terrain privilégié des analyses sociologiques, des revendications politiques et linguistiques, de prise de conscience d’une réalité complexe, de blessures et brisures identitaires que le roman voudrait guérir et ramener à une dimension plus humaine, plus tolérable.

Il n’est donc pas étonnant que Parfait Jans4 auquel est consacrée cette journée d’études non seulement ouvre le roman francophone valdôtain au roman policier et à la science fiction, mais enracine ses fictions littéraires dans un cadre historique bien déterminé. Avec Léon-Marius Manzetti et Auguste Petigat le roman valdôtain s’était en effet ouvert à des voies nouvelles, la réflexion a-historique sur la destinée de l’homme était en effet essentielle dans leurs ouvrages,5 par contre, dans la seconde moitié du XXᵉ siècle, le roman s’ouvre à l’histoire par une évolution significative et parallèle aux questionnements que le roman français se pose sur les périodes les plus tourmentées de l’histoire et sur leurs fantômes (surtout l’Occupation).6 Non seulement le passé le plus proche, mais aussi le plus inquiétant (comme le fascisme) hante l’imaginaire des romanciers contemporains (voir par exemple le roman de Jans, La Famille Carcagne), mais aussi les époques les plus reculées, les plus énigmatiques, font irruption dans le roman contemporain francophone.

Une véritable “passion des origines”7 connote les fictions de Parfait Jans, mais aussi de Thérèse Charles qui remontent sans hésitation à la préhistoire, à l’époque des Salasses,8 sans doute à la recherche d’un moment de l’histoire où la pureté des mœurs était encore dominante, mais aussi pour combler un vide, pour retrouver les origines d’un peuple fragmenté par les invasions successives. “La nozione di origine, écrit Rubino, sembra corrispondere a un vuoto impensabile. Resta la difficoltà di evocare l’immemoriale o l’antico o il passato in generale senza partire dal presente del discorso o senza sottoporsi alla pratica della ricerca e quindi all’inevitabile dilazione del punto di approdo.”9 Vogue, exigence profonde de la conscience moderne ou post-moderne, règlement de comptes avec un passé difficile à accepter au-delà des mythes et des stéréotypes?

Il reste que le roman peut parfois répondre avec plus de liberté à certains questionnements. Il est tout à fait significatif que personne n’ait jamais attaqué un roman alors que des livres d’histoire sur la période fasciste au Val d’Aoste ou sur des questions brûlantes et encore très peu étudiées comme l’annexionnisme ont suscité de violents débats.10 À l’histoire les romanciers semblent demander une explication du présent, une vision de l’avenir autant qu’une exorcisation des spectres. Le roman constitue une réflexion sur le rapport dialectique entre passé et présent, susceptible de décider l’avenir. Histoire et fiction, politique et imaginaire s’enchevêtrent ainsi de façon inextricable ainsi que les romans de Joseph Bréan et d’Emile Chanoux11 le démontrent. Le roman est mis par ces deux théoriciens au service de la réflexion politique dans un va-et-vient entre réalité et fiction, entre l’essai et le roman qui semble annoncer l’effacement des frontières entre les genres qui marque le roman contemporain.12

Les frontières du roman

Or, la réflexion sur le roman et sur ses frontières a été l’un des fils rouges de notre journée. Qu’est-il devenu ce genre littéraire ? Si Savitzkaya a pu écrire: «Le roman, c'est juste l'étiquette que l'éditeur met sur les livres. Mais le roman est un genre tout à fait libre, c'est un genre plus élastique que la poésie; on peut tout mettre dans le roman. C'est une forme ouverte. L'étiquette “roman” sur mes livres, même si elle est exagérée, est assez légitime. Mes romans ne sont pas de la poésie. Ce sont des textes fluides sans but précis»13 ou encore dire, dans une interview à son ami Guibert : «Le roman n'est pas un genre restrictif, comme la poésie »,14 d’autres auteurs ont comme lui, belge, mais ayant englouti deux langues,15 donné au roman une forme ouverte, fragmentaire et déstructurée. Son roman berce le lecteur par le rythme de ses paroles cruelles, mais en même temps tendres comme l’enfance-abri de son bonheur d’écrire. Romancier-jardinier Savitzkaya est pris par le vertige des listes rabelaisien ; le roman devient un écho sonore de la Moria érasmienne et lui fait retrouver le bonheur dans la petite musique du quotidien, dans le jardin entouré de murs et de plantes.
Roman du malheur et du péché est par contre le magnifique Les Yeux jaunes de Jacques Chessex finement analysé par Riccardo Benedettini.16 Il s’agit d’un roman où le diable se promène un peu partout dans ces pages où le mal, incarné par cet enfant diabolique aux yeux jaunes, domine et hante tous les personnages en effaçant la morale bourgeoise et les bienséances. Récit d’une chute et miroir d’une société où le mal et le péché se cachent souvent sous une couche de neige ou d’hypocrisie, comme chez Ibsen ou comme dans le récit gidien du Pasteur,17 ici le roman met en scène les failles d’une société puritaine mais où le serpent est entré dans la bergerie. Les yeux jaunes de Louis évoquent l’un des plus beaux romans de Yourcenar où les serpents aux yeux jaunes, comme les sardoines de Vittoria Colonna, sont là aussi l’emblème du péché.18 Roman de la montagne maudite, Les Yeux jaunes descend au fond du gouffre du mal et de la perversion et évoque parfois l’univers de Jans où la montagne est plutôt un enfer qu’un paradis.
C’est encore au fond du gouffre du Mal radical19 que descend un autre récit20 issu de l’expérience concentrationnaire de l’auteur à Buchenwald. Dans L’écriture ou la vie? de Jorge Semprun, ici brillamment étudié par Emanuela Cavicchi, 21 encore une fois les frontières du genre romanesque sont mises en question. Les romans de Semprun sont-ils des fictions, des mémoires autobiographiques ou des autofictions? Les réponses de la critique sont évidemment divergentes.22 Cet auteur, qui a fait de la langue sa véritable patrie,23 a écrit, en revendiquant en tant que “témoin inventif” le droit à l’art pour évoquer ce qui s'est passé à Buchenwald: «À la fin des fins lorsque l’on insiste pour savoir si ma patrie est l’espagnol ou le français, j’ai envie de répondre: j’ai le matricule 44904 inscrit sur moi depuis ma déportation à Buchenwald». Semprun a multiplié ses “identités” et ses “noms” et “prénoms”24 qui reviennent d’un livre à l’autre comme un refrain de vie et de mort et transforment sa vie et ses souvenirs en fictions en brouillant souvent les pistes et défiant les frontières entre le récit et la réalité. «La fiction intervient alors non comme l’opposé du témoignage, mais comme ce qui remet en route une dynamique des relations et permet d’associer différents plans temporels, différents lieux».25 Il a tissé une vaste toile littéraire dont le sujet principal est surtout le Mal qui hante l’homme et qui a trouvé son sommet dans les camps de concentration. Or, L’écriture ou la vie n’est pas un roman, mais un texte hybride (récit, mémoires, essai, réflexion philosophique) qui fait de sa dimension complexe et prismatique, “cubiste”, le paradigme d’une œuvre qui a su trouver les moyens pour dire l’indicible. L’aphasie, le refus d’évoquer des souvenirs cruels et l’envie de retourner à la vie sont évoqués dès le titre de ce livre où Semprun pour la première fois ne se cache pas derrière un double ou un narrateur. Le parcours du texte est circulaire et marqué par ces aller-retour de la mémoire, par des «rencontres mentales fulgurantes »26 car la vie est, pour lui, « tout le temps du déjà-vu, du déjà vécu, de la répétition, du même jusqu’à la satiété ».27 L’apparent désordre qui imite la vie et les labyrinthes de la mémoire est aussi une stratégie pour dire ce qu’il faut dire car «dans l’ordre, les choses sont indicibles».28 L’ “asphyxie de la mémoire”, l’aphasie sont les tentations de cet écrivain qui n’est en réalité jamais sorti de Buchenwald29 et qui, comme tant d’autres,30 est hanté par ce «deuil inachevé: interminable». L’art est l’unique moyen de survivre et de faire savoir. La fiction qui structure en étoile les souvenirs joue un rôle cognitif mais aussi cathartique. Il aurait sans doute aimé la citation du Journal d’Elsa Morante que Jean-Noël Schifano a mis en exergue à son dernier livre : «Ché forse tutto l’inventare è ricordarsi».31

Les racines ou les branches? Les romans de l’exil 

D’autres auteurs ont par contre fait du roman l’écho sonore des malheurs du monde, de notre société dans toute sa complexité.32 Il s’agit de romans qui nous invitent à réfléchir sur des questions centrales, celles de la migration, de l’identité éclatée, brisée, de l’appartenance, de l’hybridation culturelle et littéraire. Les importantes réflexions de Ilaria Vitali sur le roman beur33 mettent en évidence la nouveauté et l’importance de cette littérature, née à l’intérieur de l’Hexagone, qui a désormais produit plus de deux-cents ouvrages dont la plupart sont des romans. Le roman devient en effet leur moyen pour sonder le trouble identitaire, «l’érosion progressive de l’identité» qui peut transformer un enfant d’immigrés en ANI, en une sorte d’objet non identifié, en «rien». «L’identité, écrit Ilaria Vitali, devient le lieu d’une ambiguïté, une inconnue à déterminer, ce qui a poussé plusieurs écrivains à essayer d’éclairer le sujet par le prisme de la fiction narrative». Et si aux racines, au fur et à mesure qu’on entre dans le XXIᵉ, on préfère les branches ainsi que Y.B., alias Yassir Benmiloud, l’affirme :

Je me suis endormi en rêvant d’un jardin secret où il y avait pas de racines, rien que des branches, et pourtant ça poussait sans problèmes. C’était beau comme les jardins du paradis où les prophètes ils font la fête. Je sais pas trop analyser les rêves, mais toi, tu crois que c’est bon signe?34

Le néologisme intranger sait mieux évoquer une « identité interstitielle » qui se construit sur les affinités et les différences des deux cultures et qui exprime dans le roman les fruits de ces branches. Le nostos, comme chez Kundera, est désormais impossible et se révèle, parfois, plus douloureux que l’exil.35 Le roman beur de l’extrême contemporain adopte ainsi la contamination des moyens d’expression ; poèmes et morceaux de musique, références au cinéma et au réseau Internet sont ainsi greffés dans le roman qui devient multidimensionnel.

Mais tout n’est pas si beau comme ce jardin, parfois la déchirure identitaire est encore une blessure profonde surtout quand le départ des migrants est traumatique comme celui évoqué par des romans comme Cannibales de Mahi Binebine36 ou Trois femmes puissantes de Marie NDiaye.37 Ces deux romanciers, marocain le premier, française, mais de père sénégalais, la seconde, évoquent dans leurs romans “la tragédie du départ”, l’éclatement identitaire et physique sur la frontière.38 Binebine qui évoque un départ manqué a écrit ce roman pour redonner une identité, un visage à ces “Harragas”, ces “sans papiers” qui ne sont pour nous que des êtres sans nom et sans histoire : «J’ai eu souvent l’impression que les êtres dont on parlait étaient réduits à des ombres, des chiffres, des spectres anonymes. Je me suis alors lancé dans l’aventure donquichottesque de leur donner des noms, des visages, des identités».39 C’est le récit d’une nuit d’attente dans laquelle on voit les personnages qui attendent de partir prendre la parole et raconter, à tour de rôle, leur vie, leurs souvenirs et leurs espoirs. Il s’agit d’un roman polyphonique où les voix convoquées composent une sorte de Mille et une nuits du désespoir et de la misère.

Khady Demba, la troisième des femmes puissantes pourrait bien être elle aussi l’une de ces voix.40 Le récit de Khady est en effet un autre récit du malheur, une autre victime des frontières que l’on ne peut franchir sans mourir ou sans recevoir des blessures plus terribles que la mort. La terrible via crucis de cette femme vers l’exil que Marie NDiaye évoque grâce à son écriture puissante est le paradigme de tous ces parcours du malheur vers l’espoir d’une autre vie qui ne sera souvent, en réalité, qu’une vie encore plus misérable. Le roman devient ainsi le moyen de redonner leur voix aux marginaux de l’histoire,41 aux exilés, aux migrants, à ceux qui en traversant la frontière ont perdu leur identité. La mort de Khady, qui meurt foudroyée sur la frontière, évoque les rideaux de fer infranchissables des écrivains de l’Est, comme Kristof et Kundera, mais aussi la ligne bleue de l’horizon des boat people qui hante l’imaginaire de Kim Thuy, écrivain migrant du Québec: «Mais dès qu’il [le bateau] a été entouré, encerclé d’un seul et uniforme horizon bleu, la peur s’est transformée en un monstre à cent visages, qui nous sciait les jambes, nous empêchait de ressentir l’engourdissement de nos muscles immobilisés. Nous étions figés dans la peur, par la peur. … Nous étions paralysés».42

La frontière, la plage, la banlieue, le désert, la mer et la neige, encore la neige, sont des lieux paradigmatiques des romans de la migration et de ses cauchemars, mais il y a aussi les rues, les rues où ces émigrés vivent en vase clos et où ils semblent vouloir reconstruire le pays qu’ils ont quitté pour «trouver à tout prix un point d’ancrage dans ce pays d’accueil».43 «Dans le récit d’émigration la territorialité est de toute première importance», écrit Anne de Vaucher Gravili qui étudie ici le dernier roman, Le sourire de la petite juive, d'Abla Farhoud, libanaise, immigrée au Québec avec sa famille à l’âge de six ans.44 C’est l’histoire d’une rue de Montréal, la rue Hutchinson, où s’entremêlent québécois et émigrés du monde entier, un lieu de rencontre. La parole est donnée à un écrivain québécois, Françoise Camirand, qui imagine des récits de vie derrière le visage des gens qui peuplent la rue, mais surtout elle pénètre par son écriture dans la communauté hassidim. Elle imagine qu’elle voit en rêve une petite juive hassidim de douze ans qui entre chez elle et qui écrit à l’ordinateur sans la regarder. Le journal d’Hinda Rochel s’alterne ainsi à la narration de Françoise Camirand qui dresse 21 portraits de gens vivant sur rue Hutchinson. Par le biais de Hinda Abla ce roman «perce le mur des hassidim», mais il sait aussi dépasser d’autres frontières qui sont celles du genre romanesque. «Est-ce un roman?», se demande en effet justement Anne de Vaucher Gravili à propos de ce texte si ancré à la réalité de cette rue de Montréal et à ses habitants pour conclure que «cette polyphonie du texte est l’un des aspects les plus innovants de cette narration multiple, mais ce n’est pas un roman au sens classique du terme. Nous sommes en pleine postmodernité où les genres se mêlent et se confondent, voire même disparaissent, tellement le «matériau» devient malléable et sujet à des transformations imprévisibles».45 Encore une fois le roman francophone naît dans un laboratoire, le Québec, dans ce cas, où tout est en mutation et où le roman s’est ouvert «à un ensemble hétérogène de traditions, nationales ou étrangères, contemporaines ou anciennes, savantes ou populaires».46 Un roman, celui du Québec, qui a su donner une voix en français aux Chinois, aux Italiens, aux Haïtiens…47

Parfait Jans, romancier de l’émigration

Parfait Jans aussi est un romancier de l’émigration valdôtaine à Paris,48 né à Levallois-le-Perret - une sorte de petite Vallée d’Aoste à Paris - le 7 juillet 1926.49 Sa famille était originaire de Lillianes qui est le cadre de plusieurs de ses romans.50 Maire de Levallois-le-Perret de 1963 à 1983, membre du Conseil général des Hauts-de-Seine de 1976 à 1982 (il a battu deux fois Charles Pasqua) et député à l’Assemblée Nationale pendant quatre législatures (67-68, 73-86), Jans est devenu l’une des personnalités les plus connues de l’émigration valdôtaine. Il a beaucoup travaillé pour sa petite ville de banlieue («la plus grande ville de l’émigration valdôtaine», après le XIᵉ arrondissement…). On lui doit la résorption de l’habitat insalubre et la construction de nombreux logements sociaux, la construction d’écoles, de crèches, de haltes garderie, d’équipements sportifs (stades, gymnases, piscine), de bibliothèques, de nouveaux espaces verts, les services à domicile, le transport urbain gratuit et de nombreuses animations de la ville. Il fonda un centre culturel et le Conservatoire Municipal Ravel et, avec d’autres émigrés, l’ALOV (Association des Levalloisiens d’Origine Valdôtaine) qu’il installa dans un immeuble au 34, rue Pierre Brossolette. L’idée d’une Maison de la Vallée d’Aoste aussi on la doit à Parfait Jans.51 Son action politique a toujours été fondée sur une éthique rigoureuse.

Après sa retraite, loin de la politique, mais sans y renoncer totalement (il fut conseiller municipal à Chessy-les-Prés de 1989-1995), il a consacré sa vie à l’écriture de romans et d’autres textes (essais, articles, pièces, nouvelles, poèmes…).52 Il créa un site www.jans-aoste.org et un périodique, Le Salasse, parution qui fut remplacée par Quelques grains de sel et une Lettre à mes compatriotes. Il travaillait admirablement le bois; pour la préface que j’avais écrit pour Le Seing du Tabellion il m’avait offert une grande boîte en noyer avec l’église de Moron que je conserve encore dans ma maison de Grun.

Parfait Jans a écrit une vingtaine de romans, dont huit sont des policiers, trois pièces de théâtre, la première en 1981, un recueil de poèmes, une autobiographie, un essai-fiction, Délivrance du rêve à la réalité, où il met en scène des personnages historiques et des personnages de ses romans, de petits ouvrages d’histoire et un livre pour enfants, Pirouette la Marmotte.53 Son œuvre littéraire lui a valu le Prix Enea Balmas en 1995.54

Après avoir publié sa première pièce, L’insurrection des socques (1981), et des récits, Jans s’est consacré surtout au roman. Un genre qui à partir des années 1970 a connu une véritable éclosion au Val d’Aoste en s’enrichissant non seulement de l’œuvre de Parfait Jans, mais aussi de celle de Sévérin Caveri, de Thérèse Charles,55 d’Émile Proment, de Marthe Jans,56 de Maria Pia Faccini, de Daniele Gorret (qui écrit en italien). C’est à lui que l’on doit (après un premier essai de Pierre Raggi Page, en 1957, Le Mélèze sanglant) les premiers romans policiers, De profundis à Saint-Vincent (1980) et La montagne pour seul témoin, et de science-fiction, Les mystères de la Chamoisière (1989), dans la littérature valdôtaine. Il a créé un commissaire Patalu, fin et rusé sous son apparence un peu naïve, qui est le fil rouge entre ces divers polars. À ses premiers policiers, peut-être les plus réussis, il faut ajouter Le Château du bois Brûlé (1993), La Paloma de Pont-Saint-Martin (1995), Meurtre au Forum Romain (1999), René, Nino et les autres (2004), Le Mystère du lavoir (2003), Meurtres en Champagne (2007). Il alterne et fait suivre à un roman engagé un roman policier (qu’il aimait définir des “romans de recréation”), rêves et réalité, mais en ancrant le plus souvent ses fictions dans un cadre bien réel, le Val d’Aoste dont il connaissait tous les enjeux socio-politiques.

Les oubliés de l’histoire

Dans ses romans, Les amoureux du trou du diable (1989)57 et La famille Carcagne (1992), l’auteur trace une sorte d’ “histoire parallèle du peuple valdôtain” (P. Jans, «Le peuple», oct. 1991) : c’est l’histoire des exclus, des oubliés, de deux couples qui, le premier au temps de la troisième insurrection des Socques (1853), l’autre pendant et juste après le fascisme, mènent leur lutte acharnée contre l’arrogance du pouvoir, contre les “confréries des bigots”, contre l’injustice sociale. Histoires extraordinaires - l’on ne peut nier à Jans, lecteur passionné de Balzac et d’Erckmann-Chatrian (ce dernier, Alexandre Chatrian était fils, lui-aussi, d’émigrés valdôtains),58 le talent remarquable de savoir tresser des intrigues envoûtantes, un peu naïves, mais qui savent toucher en profondeur le lecteur - celle de Clovis et Marie et de Béatrice et Nicolet-, des histoires dures, voire cruelles, de misère, d’isolement, qui, dans La Famille Carcagne, mènent ces deux exclus, membres d’une famille oubliée par les autres, vers l’inceste, vers la désertion, mais sous-tendues d’une poésie du malheur qui en fait un hymne contre l’injustice. Témoignages d’une réalité socio-économique, souvent mise à l’écart pour des versions édéniques, gommant tout conflit social, la marginalisation, la souffrance de l’émigration, les romans de Jans rendent compte des antagonismes sociaux tout en gardant un charme, une fraîcheur qui leur dérivent, non pas de la recherche stylistique, mais plutôt d’une connaissance profonde de l’identité valdôtaine. Les romans de Parfait Jans semblent fournir ainsi par leur attention, par la participation émue de l’auteur à ces “vies parallèles” des montagnards, une contrepartie romanesque à l’évolution des études historiques, à la “nouvelle histoire” de l’École des Annales qui n’hésite pas à focaliser son attention sur ces oubliés de l’histoire événementielle. Jans déclare dans l’ «Avant-propos» de sa pièce de vouloir sortir le peuple valdôtain de l’ombre dans laquelle l’histoire des « prêtres, des ducs, des seigneurs, des évêques» l’a enveloppée au cours des siècles.

Jans met souvent en scène des enfants de papier auxquels on a nié leur enfance,59 des enfants qui ont dû oublier trop tôt leurs jeux, exploités, marginalisés, violés comme les héros de La Famille Carcagne, de René, Nino et les autres (où on trouve un enfant autiste et un “simplet”), comme Tonio (dans La Paloma) ou Marguerite Fruitier (dans Le Seing du Tabellion). Le thème de la marginalisation est en effet l’un des plus importants dans son œuvre romanesque qui s’accompagne, toutefois, à son principal credo, la solidarité. “Le mot solidarité est celui qui revient le plus souvent dans tous mes romans”, affirme Jans dans une interview de 1995.60

Romans identitaires, les siens, à la recherche de son Pays (cf. son site où il cite la Vallée d’Aoste comme “mon Pays”), qu’il a toujours aimé, rêvé et caressé de ses mots et de son action politique, ses rêves se brisant souvent contre la réalité, mais aussi des romans engagés où la recherche identitaire prend conscience des problèmes d’une vie dure, cruelle, parfois aux limites de la subsistance. La marginalisation, l’antagonisme idéologique et social, l’arrogance du pouvoir, sont à peine nuancés par la solidarité, par une forme de justice autre - il a une vision profondément négative de la justice officielle, corrompue et qu’il définit “injustice permanente” - celle des pauvres, des gens qui solidarisent entre eux, qui s’allient pour se défendre contre les forces du mal, incarné par le terrible et diabolique Pierre Baccan dans Le Seing du Tabellion. La sienne est une exigence morale de Justice (“la Justice avec un grand j”). S’il est vrai que parfois ces textes sont excessivement manichéens, il est vrai toutefois qu’il excelle dans l’évocation de ce monde d’enfants-bergers, d’exploités de toutes sortes, de femmes brisées par la violence, de déserteurs61 et des émigrés, des Socques, les révolutionnaires de 1853… Une révolution qui hante ses pensées :

Les différentes histoires de notre Vallée sont fort documentées…. Mais partisanes… Un exemple flagrant nous vient de l’histoire des Socques. Comment est-il possible de relater si peu et si mal ? Est-il pensable d’oublier que cette date se situe à la charnière de l’autonomie et de l’intégration ? Comment peut-on expliquer qu’un mouvement ayant rassemblé, à cette époque et dans les conditions d’alors près de huit mille personnes, soit autant négligé par les chercheurs et les historiens? («Avant-propos» à L’Insurrection des socques).

Attentif aux mécanismes de la société, aux comportements collectifs, son goût de l’histoire a aussi des visées didactiques, mettre en scène le Val d’Aoste, son histoire, ses mœurs et son identité, sa francophonie, ses villages et ses paysages pour faire connaître son Pays. Il aime les lieux symboliques, les hétérotopies (la montagne, les grottes - deux grottes dans le Trou du diable, le cachot de Nicolet),62 les bois, les maisons isolées (par exemple la maison délabrée de la famille Carcagne, les masures des marginaux, les alpages…). Dans ces textes un échange fécond a lieu entre engagement politique et fiction littéraire, entre histoire et roman. Le roman contemporain du Val d’Aoste est fortement influencé par l’histoire et, notamment, ainsi que nous l’avons écrit ailleurs par les périodes les plus importantes ou les moments de crise profonde (l’occupation romaine, les XVᵉ-XVIᵉ siècles, le XVIIIᵉ siècle, la IIIᵉ Révolution des Socques, le fascisme).63

L’œuvre de Jans ne fait pas exception. Les amoureux du trou du diable, La Famille Carcagne, Le Seing du Tabellion, Catherine de Challant sont des romans historiques où l’échange fiction/réalité est incessant, où le récit s’enracine dans l’histoire d’un peuple et en tire sa lymphe et le message identitaire qu’il veut transmettre à ses lecteurs.Il enchâsse dans le récit l’histoire et des sources authentiques (par exemple dans Le Seing du Tabellion: le Coutumier, des documents d’archives, des chroniques, les proverbes du château de Fénis et le texte de l’édit de 1561 d’Emmanuel-Philibert). Ses techniques romanesques sont plutôt récurrentes. Il aime jouer avec le temps ; il utilise par exemple fréquemment les anachronies et notamment les analepses complétives pour combler les vides de son récit qui sont pour la plupart à focalisation extérieure, régis par un narrateur extradiégétique. Il alterne mimésis et diégèse et dans la foule des personnages, emblèmes souvent du bien et du mal. Il n’est pas difficile toutefois de trouver ses porte-paroles (Clovis est son préféré). Les noms cachent la nature des personnages (“Nomen omen”) et en révèlent le caractère ainsi que la présence d’un auteur éthique. Clovis, Théo, Basile, Bernard et Baptiste sont les alter ego de l’auteur, des héros positifs qui luttent pour les plus faibles, les marginaux, pour la justice sociale, solidaires et généreux. Ses personnages féminins sont des “femmes” fortes, comme Catherine de Challant, ou rebelles comme Marie, la sauvageonne du Trou du diable.

Mais revenons à son goût de l’Histoire et à son attention aux périodes les plus difficiles de notre passé. Il consacre une Trilogie, La Trilogie du Peuple salasse, ainsi que nous l’avons vu ci-dessus,64 à la période de l’occupation romaine des Alpes et écrit une véritable épopée en trois volets du peuple salasse auquel Thérèse Charles avait aussi consacré son roman Volog, un très beau roman initiatique sur lequel souffle puissant le culte des morts, des divinités, mais où la comète annonce l’arrivée du “Dieu de la miséricorde”.65 Si l’histoire de Râahm et d’Ariothe est «une grande, noble et tragique histoire» d’amour, ainsi que Thérèse Charles l’a justement écrit dans sa belle préface,66 Jans, «pris de passion pour la cause du peuple salasse»,67 veut ainsi qu’il écrit lui-même sur son site à la notice consacrée à ce roman :

retracer la vie du peuple Salasse et les combats qu’il a dû mener pour survivre face à l’arrogance et la cruauté des Romains. La vie des Salasses, proche des mœurs des autres peuples celtes, permet de remonter dans le temps et de se demander quelles orientations aurait pris notre société si les romains n’avaient vaincu les Gaulois et les autres peuples, dont les Salasses installés dans la vallée de la Doire, entre le fleuve Pô et les Alpes. Le massacre de l’an 25 avant Jésus-Christ du peuple salasse par les légions romaines.

Un va-et-vient continu s’instaure ainsi entre le passé et le présent. Le génocide des Salasses, massacrés ou vendus au marché des esclaves d’Eporedia, est l’emblème de la tragique destinée d’un peuple que Jans évoque non seulement pour donner un cadre historique à son roman, mais pour donner un sens à notre histoire, pour combler un vide, pour défendre une identité. Dans le passé le romancier cherche le sens profond de l’histoire contemporaine. Le dialogue entre passé et présent continue d’ailleurs dans les deux romans du cycle salasse, La Combe crépusculaire(2002) et Roma doma? (2005), dans lesquels par un procédé temporel, cher aux romanciers de l’utopie,68 l’auteur fait rencontrer et dialoguer, au-delà des frontières temporelles, les anciens et les nouveaux habitants du Val d’Aoste. À cette trilogie il faut ajouter la pièce de théâtre Le Génocide du peuple salasse. Jugement valdôtain (2000) publiée en ligne.69

La Combe crépusculaire (Aoste, ITLA, 2002). 193 pages. (Roman)

Ce roman se présente comme une suite au précédent Les Salasses-Râahm et Ariothe. Les Salasses dépités du peu de cas qu’accordent les Valdôtains actuels au génocide dont ils ont été victimes, viennent à la rencontre de leurs successeurs, leur font connaître des bribes de leur ancienne civilisation et se montrent très informés de la situation de nos jours. Comment un peuple d’avant notre ère peut-il rencontrer les gens de notre époque? Par quel moyen deux civilisations séparées par deux millénaires peuvent-elles communiquer? 70

Roma doma? (Aoste, ITLA, 2005). 189 pages. (Roman)

Ce roman est la suite des deux romans précédents traitant du Peuple salasse à lire dans l’ordre de parution. De plus ce roman pénètre dans les arcanes du Ministère de l’Intérieur italien et essaie de démontrer comment l’autonomie et la parité de la langue française avec la langue italienne acquises à la Libération sont mal acceptées par le Gouvernement italien, ainsi d’ailleurs par une frange des habitants actuels de notre Vallée. Un combat permanent.71

Une autre période chère aux romanciers de la francophonie est le XVIᵉ siècle,72 une époque complexe et déchirée par les guerres et par les conflits religieux et politiques. Pour le Val d’Aoste cette période est très importante pour l’affirmation de ses droits politiques, mais est aussi une époque de profonde crise religieuse et sociale. Si L’Albero del melograno de Thérèse Charles décrit la parabole de Peronetta et de Philiberte, fille rebelle de René de Challant, qui s’évade du Val d’Aoste attirée par les splendeurs de la cour de Ferrare, Le Seing du Tabellion nous conduit au XVIᵉ siècle, l’âge d’or des institutions valdôtaines, mais où le vent de la Réforme souffle très fort en Vallée d’Aoste. En 1526, «la situation était tellement difficile qu’un candidat à l’évêché d’Aoste n’eut pas le courage d’accepter ce siège».73 L’évêque Gazin, personnage secondaire de ce roman, justifia d’ailleurs son absence au Concile de Trente par la nécessité de défendre son diocèse de l’hérésie…Mais si les événements de la grande histoire tissent la toile de fond du roman (les guerres d’Italie et les traités de neutralité signés entre le Val d’Aoste et le roi de France, la croisade contre les Turcs, la diffusion des idées réformées, la naissance du Conseil des Commis…), ces événements s’estompent au profit de la parabole de la famille Fruitier de Saint- Marcel. Marguerite, la fille aînée est injustement poursuivie par son parent Pierre Baccan, tabellion de la ville d’Aoste qui en exige la tutelle testamentaire. Encore une fois les exclus de l’histoire, manants et scieurs de bois, peuplent ce roman et se défendent avec acharnement contre l’injustice sociale. Ils s’affrontent ainsi aux labyrinthes de la justice bourgeoise et dressent leur défense grâce au Coutumier, le recueil des Costumes generales du duchez d’Aoste avec les uz et les stils du Païs, publié à Chambéry, par Louis Pomar, en 1588. C’est d’ailleurs dans cette même année que se déroule l’«histoire tragique» de Marguerite Fruitier, digne d’une nouvelle de Bandello. Le libertin et Baccan, vieux satyre, en dépit de la devise de son seing (« Foi, Honneteté, Honneur ») est un homme corrompu, une espèce d’Ogre, une incarnation du Mal. Jans met en scène la lutte entre ceux qui subissent l’histoire et ceux qui l’orientent. Dans cette lutte un peu manichéenne il est toujours du côté des faibles et de ceux qui les défendent. Voilà les synthèses de l’auteur même :

Le Seing du Tabellion, 1994. 260 pages. (Roman)

Actions situées au XVIᵉ siècle. 1588 Coutumier Un livre proche du roman historique puisque les dates et les grands événements de l’époque sont réels, mais les protagonistes sont imaginaires. Retrace la vie d’une jeune orpheline qu’un cousin aventurier veut faire placer sous sa tutelle. Plusieurs villages se battent contre ce tabellion peu scrupuleux et se servent du Coutumier qui vient d’être publié en langue française. Ce roman cherche à faire connaître l’existence de ce précieux ouvrage publié avec l’autorisation du duc de Savoie, Charles-Emmanuel. 74

Catherine de Challant, 1996. 248 pages. (Roman historique) 

Roman d’une femme luttant pour ses droits de femme. Au 15ème siècle, les femmes de la noblesse comme celles du peuple avaient peu de droits. Catherine de Challant, fille du comte François de Challant, ayant reçu en héritage le comté et le titre avec l’accord du duc de Savoie, se battra sa vie durant pour faire respecter la parole donnée et l’ensemble de ses droits. Un combat comme celui-ci n’est pas exempt d’une vie amoureuse. Catherine de Challant a connu les combats, la vie amoureuse et a fort bien assumé son devoir de mère.75

Le fascisme

Le fascisme, ainsi que nous l’avons vu, est aussi l’un des moments tragiques qui ont le plus inspiré les romanciers valdôtains ainsi que l’après-guerre, autre période cruciale pour la destinée de la Vallée d’Aoste, Jans, comme Proment dans son Roman d’un jeune valdotain,76 ressuscite l’esprit et les fantômes de cette époque tourmentée et pleine d’incertitudes (le plébiscite, l’annexionnisme, les procès…) aussi bien dans La Famille Carcagne (1991), qui aborde le thème de l’exclusion, de la ségrégation et de la désertion, que dans Les Frères Bioulaz (2000) qui évoque l’existence de ces deux frères aux idées très différentes entre la chute de Mussolini et la Libération d’Aoste par les maquisards.

La Famille Carcagne, 1991. 197 pages. (Roman, 1942)

Traite de la situation d’une famille traditionnellement mise à l’écart par les autres familles du village, sans que nul ne se souvienne à quand remonte cette mauvaise décision et sur quoi elle repose réellement. La ségrégation y est représentée sous ses aspects négatifs et le roman montre comment une femme subissant ce triste sort en vient à pratiquer, elle-même, sur deux membres de sa famille cette regrettable ségrégation. Situé durant la dernière guerre, le roman permet de vivre certaines loufoqueries du dictateur italien et les drames des soldats envoyés sur le front Yougoslave; puis il entre dans la vie d’un déserteur...

Les frères Bioulaz, 2000. 270 pages. (Roman)

L’atroce deuxième guerre mondiale vient de se terminer. Depuis la chute de Mussolini jusqu’à l’invasion de la vallée d’Aoste par les troupes allemandes; depuis la Libération d’Aoste par les maquisards jusqu’à l’évaporation subite des cadres fascistes et autres chemises noires, tout un passé renaît et chemine dans la tête des Valdôtains. Deux frères aux patriotismes différents vont essayer de tirer leur épingle de cette situation.. Un amour impossible; le sable; l’industrie du sable  «Tout dépend du sable, frérot, tout le monde en a besoin, on ne fait rien sans sable ; pour rénover ou bâtir une maison, pour édifier des palaces, il faut et il faudra toujours du sable…»

Or, si dans tous les romans de Jans on retrouve «cet ensemble de grandeurs et de petitesses qui a caractérisé et qui caractérise la vie de nos petites communautés rurales»,77 si cet auteur excelle dans la description des caractères, mais aussi de l’environnement, des mystères et de la beauté absolue de la montagne et de ses paysages, ses romans “parisiens et champenois” souffrent d’une sorte de déracinement et perdent le charme de la montagne enchantée, son souffle mystérieux qui sait inspirer notre auteur. Le roman, De Pavie à Coursil dont l’histoire se déroule en banlieue parisienne, dans le monde des magouilles immobilières et de la corruption politique, ainsi que le roman policier, Le Château du bois Brûlé (1993) qui évoque une affaire de sang et de lingots d’or à la Libération et le roman de l’émigration, De Dijon au Val d'Aoste (2008) semblent s’éloigner de la beauté que la montagne de l’esprit inspire à cet auteur qui l’a probablement tellement caressée de ses rêves d’enfant d’émigrés. L’enracinement des caractères qui crée le charme des romans de Jans est perdu et ses schémas littéraires ont des difficultés à s’adapter à la réalité urbaine, trop complexe et fuyante.78

Les romans parisiens et champenois

De Pavie à Coursil, 1992. 205 pages. (Roman)

Se situe pour l’essentiel dans la région parisienne, les immigrés valdôtains tiennent leur place dans ce roman qui traite des affaires immobilières d’une certaine commune de banlieue dirigée par un maire peu scrupuleux.79

Le Château du bois Brûlé, 1993. 164 pages. (Policier)

Premier des deux romans de Parfait Jans ne traitant pas de la Vallée d’Aoste et des Valdôtains. La prescription d’un crime peut-elle soulager une conscience au point de mener à l’oubli? L’homme peut-il se blanchir tout seul, même lorsque la société le laisse tranquille? Un jour ou l’autre surgit toujours le petit déclic qui remet tout en cause... 80

Le Mystère du lavoir, 2003. 123 pages. (Policier)

Deuxième roman de Parfait Jans ne traitant pas de la Vallée d’Aoste et des Valdôtains. Ce roman est implanté en Pays d'Armance dans l'Aube, région Champagne-Ardenne. Il part de Saint-Florentin où le personnage central dirige une entreprise de transport dont le siège est situé dans la zone industrielle de cette commune. Le lendemain du deuxième tour de l'élection présidentielle le trouve dans un état second. Sa gueule de bois n'est pas due aux seules libations. Il rencontre un client…  De là surgit le drame. Dans la commune de Montigny-les-Monts existe un petit lavoir nouvellement restauré… 81

Meurtres en Champagne, 2007. 144 pages. (Policier)

Nous sommes sur les terres de France: la Champagne, le Bourgogne, Plessis-la-Plaine, Saint-Nicolas-sur-Armance, deux régions, deux villages, quatre noms qui poussent au rêve et ouvrent à eux seuls de beaux instants de chaude fraternité. À leur insu, les habitants de la commune de Plessis-la-Plaine, ville de cinq cents âmes, vont se retrouver indirectement mêlés, en plus de leurs préoccupations habituelles, à une de ces affaires parisiennes qu'ils observent toujours avec méfiance et prudence. Il est bien loin le temps où ils vivaient au rythme du pas tranquille des bœufs. Même les anciens s'y sont mis. La vie, grande fabrique de souvenirs ne s'arrête jamais. Le travail a changé, la cadence s'est accélérée, le modernisme avance à grands pas et pourtant, la sérénité provinciale demeure encore bien protégée de la vie trépidante du monde citadin...82

De Dijon au Val d'Aoste, 2008

Certains arrivent dans le pays choisi les poches pleines, ils sont mieux acceptés, mais pour la très grande majorité, ils se trouvent totalement démunis et n’ont qu’une hâte, gagner de l’argent, non seulement pour survivre, mais aussi et surtout pour envoyer au pays l’aide vitale que la famille espère. La présence des immigrés occasionne toujours des discussions, les pour et les contre. La question est souvent au centre des débats politiques, mais rarement, pour ainsi dire jamais, la curiosité pousse les habitants du pays d’accueil à essayer de comprendre l’immensité de la déchirure familiale que représente le départ de l’un de ses membres, père, mari, frère ou fils. Car ce drame existe, il est profond et souvent destructeur. Chaque candidat à l’émigration, qu’il soit argenté ou pauvre à ne pas manger à sa faim, subit ce traumatisme. Ce drame est trop intime pour être divulgué. Souvent ce silence s’étend aux enfants nés en terre d’accueil et alors les parents sont soumis à la question et doivent, un jour ou l’autre, sortir de leur mutisme. Parfois cette explication est délicate et difficile... Parler enfin du pays ouvre immédiatement la question d’une visite ou d’un retour définitif au pays. Mais là encore, l’émigré de retour subira un autre choc, car peu ou prou, il sera considéré, une nouvelle fois, non comme un étranger, mais comme un compatriote à part. La famille Besace, du roman De Dijon au Val d’Aoste passe, elle aussi, par tous les stades énoncés ci-dessus. 

Sa vision pessimiste de la réalité, son désenchantement, la souffrance d’une déchirure identitaire sont encore plus évidents dans ces romans de l’exil, mais son rêve de justice, de solidarité entre les hommes domine toutes ses histoires, noires et cruelles, mais qui sont sous-tendues par l’espoir dans un monde meilleur, plus juste, plus équitable. Son engament politique et social a laissé une trace profonde qui marque ses romans et donne un nouvel espoir aux exclus de l’histoire.

Jans a écrit jusqu’à sa fin, envoyé des courriers électroniques et des textes à tous ses amis. Son dernier message que j’ai reçu quand il était déjà malade dit toute sa tristesse et son adieu à “sa” cause :

Courriel du 23 déc. 2010

objet: mon stop

Chère amie,

Pour une raison majeure liée à ma santé, je crois utile et respectueux à votre égard de vous informer que je cesse, à dater de ce jour, toute activité concernant notre Vallée, notre autonomie, notre francophonie et nos traditions.

Je mets fin, aussi, à la publication de mes bulletins; «Le Salasse»; la «Lettre à mes compatriotes» et «Le Grain de sel».

Bien fraternellement à vous et bonne année 2011!

Parfait JANS

Remerciements

Nous remercions l’Université de Vérone qui a bien voulu promouvoir cette VIᵉ Journée de la francophonie.

Les intervenants et tous ceux et celles qui ont collaboré à l’organisation de la Journée et à la préparation des Actes: Daniele Speziari, Letizia Mafale, Anderson Magalhäes, Riccardo Benedettini, Giampaolo Caliari, Elena Quaglia. Nous remercions aussi Daniele de Giorgis, maire de Lillianes, la famille Jans, l’ALOV, l’UVP et Thérèse Charles.

Un grand merci aussi à Elisa Bricco et à Publifarum qui ont accueilli les Actes de cette Journée Parfait Jans.


Note

↑ 1 Voir pour une synthèse de ce retour au sujet P. TAMASSIA, «Dagli anni Ottanta all’inizio del nuovo millennio», in L. Sozzi (éd.), Storia europea della letteratura francese, II. Dal Settecento all’età contemporanea, Torino, Einaudi, 2013, p. 348 sq. Sur le roman contemporain voir aussi B. BLANCKEMAN et J.-C. MILLOIS (éds.), Le Roman français aujourd’hui. Transformations, perceptions, mythologies, Paris, Prétextes, 2002; B. Blanckeman, A. Mura-Brunel et M. Dambre (éds.), Le roman français au tournant du XXIᵉ siècle, Paris, Presse de la Sorbonne Nouvelle, 2004 et G. RUBINO, Il romanzo francese contemporaneo, Roma-Bari, Laterza, 2012.

↑ 2 Voir ci-dessous la belle contribution de M. MODENESI, «Un problème de compréhension. Tradition et roman policier en Afrique noire», qui explique de façon convaincante comment les littératures africaines ont su adopter et plier aux exigences de leur tradition ce genre littéraire.

↑ 3 Voir, par exemple, les romans de Ananda Devi qui dénoncent les conflits socio-économiques de l’Île Maurice et lézardent l’image de paradis terrestre de son île.

↑ 4 Sur Parfait Jans, cf. la Bibliographie publiée ci-dessous.

↑ 5 Sur ces romanciers, cf. R. GORRIS CAMOS, «Romans et romanciers valdôtains (avec des lettres inédites de L.-M. Manzetti)», in R.GORRIS CAMOS (éd.), Réalités et perspectives francophones dans une Europe plurilingue, Actes du XIXᵉ Colloque de la S.U.S.L.L.F, Saint-Vincent 5-9 mai 1993, Aoste, Imprimerie Valdôtaine, 1994, p. 127-153 et EAD., «L'aventure poétique et romanesque de Léon-Marius Manzetti, le Rimbaud valdôtain» in "Il n'est nul si beau passe temps Que se jouer a sa Pensee" (Charles d'Orléans). Studi di filologia e letteratura francese in onore di Anna Maria Finoli, Pisa, Edizioni Ets, 1996, p. 473-490 et EAD., «Léon-Marius Manzetti» in Les Cent du millénaire, Aoste, Musumeci, 2000, p. 213-218. Thérèse Charles vient de retrouver et de publier le roman de Manzetti, Le Guide, longtemps considéré perdu, in L.-M. MANZETTI, Le Guide, roman des Alpes valdôtaines, Aoste, Duc, 2011. Le roman avait été publié en feuilletons dans L’écho de la Vallée d’Aoste, publié à Paris, dans les années 1936-1938. Sur Auguste Petigat voir la belle Thèse de E. CUNEAZ, Un valdôtain à Paris: Auguste Petigat, R. Gorris dir., Université de Milan, a.a. 1999-2000. et R. NICOLINI, L’abbé Auguste Petigat. L’impegno giornalistico, l’opera sociale e politica a favore degli emigrati valdostani a Parigi, Aoste, Le Château, «Biographica», 28, 2007.

↑ 6 Cf. G. RUBINO, «Romanzo e storia», in Il romanzo francese contemporaneo, cit., p. 32-61.

↑ 7 Ibidem, p. 32.

↑ 8 Les Salasses ont tellement focalisé l’attention de Jans qu’il a non seulement écrit des romans dont l’histoire se déroule au temps des Salasses (cf. la Trilogie : Râahm et Ariothe, Aoste, Duc, 1997 et La Combe crépusculaire, Aoste, ITLA, 2002 et Roma doma?, Aoste, ITLA, 2005 ), mais il avait aussi créé un périodique dont le titre était Le Salasse qui, à partir du 23 octobre 2006, s'intitula: Le Salasse Premier Peuple du Val d'Aoste jusqu'en 2008, ce qui représente 150 numéros. Cette parution fut remplacée par quelques Grains de sel et une Lettre à mes compatriotes. La dernière porte le n. 62 et date du mois de novembre 2009. Voir la bibliographie ci-dessous et le site http://www.jans-aoste.org où tous les périodiques sont mis en ligne.

↑ 9 G. RUBINO, «Romanzo e storia», in Il romanzo francese contemporaneo, cit., p. 36. Voir aussi la section «Histoire» du volume Le roman français au tournant du XXIᵉ siècle, cit., p. 99-183.

↑ 10 Voir par exemple les polémiques autour du livre de A. DÉSANDRÉ, Notabili valdostani. Dal fascismo al fascismo : viaggio a ritroso e ritorno, Aosta, Istituto storico della Resistenza e della Società contemporanea in Valle d’Aosta, Le Château, 2008, 459 p. (Prix Balmas 2009).

↑ 11 Voir sur les romans de Chanoux tué par les nazis, R. GORRIS CAMOS, «La production littéraire d’ Ėmile Chanoux dans le panorama de la culture valdôtaine», in Ėmile Chanoux et le débat sur le fédérali­sme, Actes du Colloque international, Aoste (24-25 novembre 1995), Nice, Presses d’Europe, 1997, p. 166-177.

↑ 12 Cf. G. RUBINO, «Romanzo e storia», in Il romanzo francese contemporaneo, op. cit, p. 36: «E la complessità dei discorsi oggi esperiti sembra vanificare le distinzioni fra i generi. Finzione e dizione, narrativa e saggistica si contaminano tra loro. Alcuni autori orientano linguaggio e scrittura in senso meta-discorsivo e meta-culturale a esplorare fasi, esperienze, espressioni della civiltà occidentale».

↑ 13 Cf. ci-dessous la belle analyse de M. BISERNI, «Esilio interiore e riscrittura del reale in Fou trop poli di Eugène Savitzkaya». Sur cet auteur voir aussi E. BRICCO, «Eugène Savitzkaya et le bonheur des choses simples», in R. Amar (éd.), L’Ecriture du bonheur dans le roman français contemporain, Cambridge Scholars Publishing, 2011, p. 81-94 et D. CONNON,Subjects Not-at-home: Forms of the Uncanny in the Contemporary French Novel: Emmanuel Carrère, Marie NDiaye, Eugène Savitzkaya, New York, Rodopi, 2010.

↑ 14 H. GUIBERT, « Une rencontre entre Eugène Savitzkaya et Hervé Guibert », Minuit, n. 49, mai 1982, p. 2-12.

↑ 15 « J'ai désappris deux langues. J'ai désappris des lieux et j'ai peut-être perdu quelques privilèges » in E. SAVITZKAYA, Fou trop poli, p. 15.

↑ 16 Voir ci-dessous R. BENEDETTINI, «Il peccato nella scrittura di Jacques Chessex: qualche osservazione su Les Yeux jaunes».

↑ 17 Sur cette couche de neige et sur ses significations métaphoriques, cf. A. GIDE, La Symphonie Pastorale, présentée, annotée et analysée par R. Gorris, coll. «Pour lire», dirigée par G. Bogliolo, Rapallo, CIDEB, 1994, 128 p. (plus un Livre du professeur de 57 p.).

↑ 18 Cf. R. GORRIS CAMOS, «Renouer avec la mémoire: histoire et identités dans le roman francophone (Del Castillo, Yourcenar, Aquin & les autres) », in R. Gorris (éd.), Variations autour d’Agota Kristof, Atti della giornata Agota Kristof, con la collaborazione di S. Arena e R. Benedettini, Verona, 26 maggio 2006, Publifarum, n. 13, 2010 (www.publifarum.it).

↑ 19 «L’enjeu ne sera pas la description de l’horreur. Pas seulement, en tout cas, ni même principalement. L’enjeu en sera l’exploration de l’âme humaine dans l’horreur du Mal… il nous faudra un Dostoïevski!», écrit J. SEMPRUN, L’écriture ou la vie?, Paris, Gallimard, 1994, p. 170.

↑ 20 Sur cette notion problématique de récit, voir D. RABATĖ, «À l’ombre du roman. Propositions pour introduire à la notion de récit», in B. BLANCKEMAN et J.-C. MILLOIS(éds.), Le Roman français aujourd’hui, cit., p. 37-60.

↑ 21 Voir ci-dessous E. CAVICCHI, «Jorge Semprún, la verità della letteratura» et sa belle Thèse de doctorat, EAD. “Suffisamment d’artifice pour que ça devienne de l’art”: Jorge Semprún, la riscrittura della vita, R. Gorris Camos dir., Università degli Studi di Milano, a.a. 2003/2004.

↑ 22 Sur Semprun voir M. A. SEMILLA DURAN, Le masque et le masqué: Jorge Semprun et les abîmes de la mémoire, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2005 ; M. TURET, «Jorge Semprun, le témoin inventif», in Le roman français au tournant du XXIe siècle, cit., p. 103 et les ouvrages cités par E. Cavicchi, infra.

↑ 23 Cf. Le langage est ma patrie, Paris, Libella / Maren Sell, 2013 un ouvrage issu des entretiens réalisés par Frank Appréderis avec Jorge Semprun en 2010.

↑ 24 Il s’agit souvent de noms et prénoms utilisés pendant la Résistance., par exemple Gérard, le narrateur de Le Grand voyage porte son prénom de résistant.

↑ 25 M. TURET, Jorge Semprun, le témoin inventif, cit., p. 108.

↑ 26 J. SEMPRÚN, L’évanouissement, Paris, Gallimard, 1967, p. 125.

↑ 27 J. SEMPRÚN, Quel beau dimanche, Paris, Grasset, 1980, p. 367.

↑ 28 J. SEMPRÚN, L’évanouissement, cit., p. 56.

↑ 29 «Non seulement j’y avais été, mais j’y étais toujours », cf. J. SEMPRÚN, Quel beau dimanche, cit., p. 210.

↑ 30 Voir par exemple Primo Levi et Charlotte Delbo.

↑ 31 Cf. J.-N. SCHIFANO, E. M. la Divine Barbare : roman confidentiel non finito, Paris, Gallimard, 2013.

↑ 32 Sur les rapports complexes entre le roman et la société contemporaine, voir: P. TAMASSIA, «Romanzo e società» in Il romanzo francese contemporaneo, cit., p. 62-88 qui évoque, p. 74, la crise identitaire des immigrés du Maghreb, mais n’aborde pas la question cruciale du roman beur. Voir aussi pour la complexité du rapport entre réel et roman, T. SAMOYAULT, «Un réalisme lyrique est-il possible?» in Le roman français aujourd’hui, cit., p. 79-94.

↑ 33 Voir ci-dessous I. VITALI, «Une promenade dans le bois du roman beur: de Mehdi Charef à Rachid Djaidani» Voir aussi I. VITALI (éd.), Intrangers, Bruxelles, Academia/L’Harmattan, 2011.

↑ 34 Y.B., Allah superstar, Paris, Grasset, 2003, p. 95.

↑ 35 Cf. M. KUNDERA, L’ignorance, Paris, Gallimard, 2001.

↑ 36 Voir ci-dessous la communication de E. BRICCO, «Raconter le départ: Cannibales de Mahi Binebine» et le site de l’auteur, www.mahibinebine.com .

↑ 37 M. NDIAYE, Trois femmes puissantes, Paris, Gallimard, 2009. Voir l’étude du récit de Khady, troisième volet de cette trilogie du malheur et de l’exil au féminin, dans E. QUAGLIA, «Marie NDiaye, de l’écriture migrante à une écriture de la migration» publié ci-dessous.

↑ 38 Sur cette notion de frontière, cf. les Actes du Colloque de Vérone, Frontiere, confini, limiti, soglie, Vérone, les 14-15 février 2013 et notamment la communication de L. MAFALE, «“Vivre entre-deux”:il concetto di frontiera in Milan Kundera, Agota Kristof e Andreï Makine», sous presse.

↑ 39 M. BINEBINE, « Des rêves à l’eau », La Croix, URL : http://www.mahibinebine.com/Mahi_BineBine /Textes/Entrees/2009/10/16_Des_reves_a_leau.html , cons. 16 juillet 2010.

↑ 40 M. NDIAYE, Trois femmes puissantes, cit.

↑ 41 Sur le rapport entre le roman contemporain et la marginalité, voir: P. TAMASSIA, « Romanzo e società » in Il romanzo francese contemporaneo, cit., p. 74 sq., qui écrit : « L’analisi del malessere sociale si concentra molto sulla figura del marginale urbano, assai diffusa nei romanzi contemporanei che permettono di coglierne le caratteristiche peculiari nel mondo attuale. » Sur le roman et l’immigration cf. C.ALBERT, L'immigration dans le roman francophone contemporain, Paris, Karthala, 2005.

↑ 42 KIM THUY, Ru, Paris, Liana Levi, 2009, p. 15. Sur les écrivains venus d’Orient et notamment sur les écrivains d’origine chinoise, voir ci-dessous l’étude de L. COLOMBO, «Pouvoirs et déboires de la littérature: Balzac et la petite tailleuse chinoise de Dai Sijie».

↑ 43 Cf. ci-dessous la belle analyse de A. DE VAUCHER GRAVILI, «Le dernier roman d’ Abla Farhoud, Le sourire de la petite juive».

↑ 44 A. FARHOUD, Le sourire de la petite juive, Montréal, VLB, 2011. Sur l’auteur voir la bibliographie dressée par Anne de Vaucher Gravili infra.

↑ 45 Ibidem.

↑ 46 M. BIRON, F. DUMONT, E. NARDOUT LAFARGE, Histoire de la littérature québécoise, Montréal, Boréal, 2007, p. 629.

↑ 47 Voir sur le roman québécois M. BIRON, F. DUMONT, E. NARDOUT LAFARGE, Histoire de la littérature québécoise, cit.

↑ 48 Sur l’émigration valdôtaine à Paris, cf. E. RICCARAND-T. OMEZZOLI, Sur l’émigration valdôtaine : les données économiques et sociales (1700-1939) : une anthologie de la presse (1913-1930), Aoste, Musumeci, 1975.

↑ 49 Sur la biographie de Jans on renvoie aux travaux cités dans la bibliographie ci-dessous.

↑ 50 La commune de Lillianes et son maire Daniele de Giorgis, que nous remercions ici, ont organisé une cérémonie en souvenir de Parfait Jans, le 7 août 2012, avec des interventions de Thérèse Charles et de Rosanna Gorris Camos.

↑ 51 Actuellement la Région Autonome de la Vallée d’Aoste a acheté un immeuble dans le Ier arrondissement, 9, rue des Deux Boules., cf. http://www.maisonvda.com/maisonvda/index.php.

↑ 52 La plupart de ses poèmes ont été réunis dans son recueil Ma Vallée, mes peines, mes colères. Poèmes. Recueil de 1992 à 2009, Aoste, ITLA, 2009.

↑ 53 Voir la bibliographie publiée ci-dessous.

↑ 54 Cf. www.francesisti.it.

↑ 55 Voir R. GORRIS CAMOS, « Thérèse Charles », in M. Calle-Gruber, B. Didier et A. Fouque (éds.), Dictionnaire des femmes créatrices, Paris, Les Éditions des Femmes, ad vocem.

↑ 56 Voir R. GORRIS CAMOS, «Marthe Jans», in Dictionnaire des femmes créatrices, cit., ad vocem.

↑ 57 Sur ce beau roman, peut-être l’un des plus beaux, voir la belle analyse de Th. CHARLES, «Parfait Jans, de petit berger à parlementaire de la République et retour: Les amoureux du trou du diable (1989), roman de la montagne» publiée ci-dessous.

↑ 58 A. Chatrian, coauteur du tandem Erckmann-Chatrian, serait donc le véritable précurseur donc du roman valdôtain, si on adopte la logique, assez contestable des éditeurs du roman de M. GAMBA, Un rêve au Mont-Blanc, Aoste, Le Château, 2012. Madeleine Gamba ne peut absolument pas être considérée «aux fondements de la littérature valdôtaine», ainsi que les éditeurs l’affirment, sans aucun fondement historique, pour la simple raison que ses romans n’ont jamais été lus au Val d’Aoste, ainsi que les éditeurs le reconnaissent aussi (cf. p. 13). Un rêve au Mont-Blanc est resté un “rossignol”, alors que Chatrian a eu un immense succès ; selon Lexert leur “notoriété égala presque celle de Jules Verne”. Sur Alexandre Chatrian, cf. P. LEXERT, «Alexandre Chatrian: extrapolation d’auteur valdotain» in R. GORRIS CAMOS, La littérature valdôtaine au fil de l’histoire, Aoste, Imprimerie Valdôtaine, 1993, p. 327 sq. qui démontre l’intérêt de cet auteur pour notre littérature. Le numéro de Europe, n. 549/550 de janvier-février 1975 est consacré à ce célèbre duo littéraire.

Pour une bibliographie plus exhaustive sur ces deux auteurs, cf. N. BENHAMOU, Bibliographie Erckmann-Chatrian, site Erckmann-Chatrian.eu, http://www.erckmannchatrian.eu/Bibliographie/accueilbibliographie.html: date de consultation 15 mars 2013.

↑ 59 Sur le thème des enfants dans le roman francophone voir la belle thèse de F. CASANOVA, Bambini di carta, R. Gorris dir., Université de Milan, a.a. 2002-2003.

↑ 60 Cf. C. PASSINO, Letteratura e storia nella narrativa contemporanea della Valle d’Aosta, A. P. Mossetto dir., Université de Turin, a.a. 1994-1995, p. 180-187.

↑ 61 C’est un des personnages-clés de la littérature du Val d’Aoste avec le faussaire et le contrebandier.

↑ 62 Le thème de la grotte revient souvent dans les romans du Val d’Aoste, voir par exemple M. GAMBA, Un rêve au Mont-Blanc, Paris, E. Dentu, 1864, un roman dans lequel le thème de la grotte, abri et berceau est aussi important (un ex. à la BnF, Y2 37824 et un autre à la Bibliothèque de l’Arsenal, 8° BL 25669). Sur l’importance des montagnes dans la littérature du Val d’Aoste, cf. R. GORRIS CAMOS, « La prophétie des montagnes: littérature et géographie au Val d’Aoste, région “intramontaine” », in A. Emina (éd.), Les mots de la terre. Géographie et littératures francophones, CNR, «Gruppo di Studio delle Culture Letterarie dei Paesi anglofoni, francofoni, iberofoni», Roma, Bulzoni, 1998, p. 103-123.

↑ 63 R. GORRIS CAMOS, «Le genre narratif contemporain: la vogue du roman historique», in La littérature valdôtaine au fil de l’histoire, cit., p. 311-313 et EAD., Romans et romanciers valdôtains, cit.

↑ 64 Cf. n. 8 supra.

↑ 65 Th. CHARLES, Volog, Aoste, Duc, 1985. 

↑ 66 Th. CHARLES, « Préface » à Les Salasses: Râahm et Ariothe, roman valdôtain, Aoste, Duc, 1997, p. 5-7.

↑ 67 P. JANS, «Introduction» à La Combe crépusculaire, Aoste, Itla, 2002, p. 5.

↑ 68 Sur ces procédés romanesques voir M. MEZZETTI, Metamorfosi dell'utopia, préface de R. Gorris Camos, Pise, Edizioni ETS, 2011.

↑ 69 Cf. http://www.jans-aoste.org/theatre.html.

↑ 70 Ibidem.

↑ 71 Ibidem.

↑ 72 Voir par exemple le roman d’ H. AQUIN, L’Antiphonaire, mais aussi d’autres romanciers comme Yourcenar, Del Castillo et cf. notre «“Renouer avec la mémoire”: histoire et identités dans le roman francophone (Del Castillo, Yourcenar, Aquin & les autres)», cit.

↑ 73 Cf. A. ZANOTTO, Histoire de la Vallée d’Aoste, Aoste, Musumeci, 1980, p. 114.

↑ 74 Cf. http://www.jans-aoste.org.

↑ 75 Ibidem.

↑ 76 Cf. sur Émile Proment, R. GORRIS, Romans et romanciers, cit., p. 144-145 et la Thèse de S. APOSTOLO, Émile Proment, Université de Milan, Rosanna Gorris dir.

↑ 77 A. BĖTEMPS, «Préface» à P. JANS, La Famille Carcagne, cit., p. 5.

↑ 78 Voir sur ces réflexions, R. GORRIS, Romans et romanciers, cit., p. 145.

↑ 79 Cf. http://www.jans-aoste.org.

↑ 80 Ibidem.

↑ 81 Ibidem.

↑ 82 Ibidem.

 

Dipartimento di Lingue e Culture Moderne - Università di Genova
Open Access Journal - ISSN 1824-7482