Publifarum n° 23 - Les avatars de la métaphore

Les métaphores racistes dans les discours d’extrême-droite en France et en Italie - Les cas de C. Taubira et de C. Kyenge

Silvia MODENA, Lorella SINI



Abstract

Francese  | Inglese 

Nous analysons dans cette étude, les formes discursives contenant des figures métaphoriques xénophobes, racistes et sexistes dans un corpus tiré des discours d’extrême droite en France et en Italie (la presse, les interventions orales, les sites de la sphère du Front National et de la Lega). Nous avons relevé au cours de l’année 2013 les discours politiques relatifs à la présence de deux ministres noires dans les gouvernements des deux pays: Christiane Taubira (sous le gouvernement Hollande) et Cécile Kyenge (sous le gouvernement Letta). Nous interrogeons ces figures de rhétoriques, parmi lesquelles des représentations iconographiques, ainsi que le double langage typique des discours d’extrême droite où derrière les jeux de mots se cache une visée intentionnelle reconductible à une idéologie clairement colonialiste.

« Seront désaliénés Noirs et Blancs qui auront refusé de se laisser enfermer dans la Tour substantialisée du passé. » (Frantz Fanon : Peau noire, masques blancs, 1952).

Introduction1

Malgré les différences entre les carrières politiques des deux ministres Christiana Taubira (Ministre de la Justice et Garde des Sceaux sous le gouvernement Hollande) et Cécile Kyenge (Ministre de l’intégration sous le gouvernement Letta), et le contexte culturel et historique particulier de deux pays voisins comme la France et l’Italie, des faits comparables ont produit des événements discursifs similaires. La monstration de figures métaphoriques au goût douteux sur les réseaux sociaux et sur les sites de représentants politiques de cette droite dite « décomplexée », ont marqué le début d’une polémique, en tous points similaire dans les deux pays. Nous allons examiner dans notre étude ces figures en nous interrogeant sur la nature même de ces procédés, leur statut sémantique et sémiotique (puisqu’il s’agit aussi d’images) et la valeur pragmatico-discursive qu’il faudrait, selon nous, leur attribuer en les resituant dans leur contexte discursif et historico-culturel.
Notre corpus est relativement hétérogène et s’étend sur tout le deuxième semestre 2013, période où se sont déroulées parallèlement les deux affaires en question : il comprend aussi bien des journaux d’extrême-droite comme Rivarol et Minute pour la France ou La Padania, journal officiel de La Lega Nord pour l’Italie, mais aussi les sites de ces mêmes journaux, ceux des partis politiques comme le Front National, des groupes plus ouvertement extrémistes comme Égalité et Réconciliation, ainsi que des interviews ou déclarations enregistrés par différents médias.

1- Les faits et les attaques « ad personam »

En Italie, Cécile Kyenge, Ministra per l’integrazione e le politiche per la gioventù sous le gouvernement Letta (avril 2013-février 2014), est la première ministre noire de la République italienne. Dès le début de son mandat elle subit les agressions répétées et quasi obsessionnelles de La Lega Nord, parti sécessionniste et xénophobe voire raciste. En effet, en accord avec l’idéologie prônée par ce parti qui place la lutte contre l’immigration et le multiculturalisme au centre de son programme politique, on l’accuse de ne pas être italienne « de souche » mais d’origine congolaise ; ainsi, les représentants et les membres de ce parti la dénomment à l’occasion « la congolese al governo »2, « ministro di colore / nera »3, ou « ministra afro-italiana»4, ajoutant une spécification adjectivale se référant à un ethnotype destiné à dénigrer sa fonction institutionnelle 5 : une ministre de couleur étant dès lors considérée comme une sous-classe, une sorte d’hyponyme de la catégorie /ministre/.
Ainsi, C. Kyenge reçoit des attaques ad personam qui, contrairement à l’attaque ad hominem, ne permet pas la mise en cause de « la vérité d’une assertion ou la légitimité d’une conduite » mais « fait référence à des caractéristiques négatives particulières à la personne qui les soutient » (PLANTIN 1996 : 84). Les procédés métaphoriques que nous allons étudier ont engendré des argumentations fondées sur un type de confrontation qui ne se contente pas d’attaquer le « dit » d’un locuteur (argument ad hominem) mais qui intercepte de prétendues incohérences et de ce fait la disqualifie. Dans le cas de C. Kyenge, les incohérences qui disqualifieraient sa légitimité politique sont dues au fait qu’elle soit congolaise, noire et, cependant, Ministre italienne. Ce type d’argument se rapproche de l’insulte pure et simple, l’insulte ad hominem étant un mot-action, un mot-polémique, « toujours foncièrement raciste parce qu’elle s’appuie sur des catégories ethniques, sociales, physiques qu’elle essentialise par stigmatisation » (ROSIER 2006 : 101).
Le 12 juillet 2013 lors d’un meeting à Treviglio, le sénateur de la Lega Nord Roberto Calderoli, célèbre pour ses boutades et ses actes provocateurs, se réfère sans la nommer directement à la nouvelle ministre par ces mots : « sembianze d’orango » (« traits d’orang-outang »). Cette locution sera suivie d’autres formes expressives qui reprendront cette image- cette fois dans le sens premier du terme - , un photomontage paru le 18 juillet sur la page Facebook de Agostino Pedrali, conseiller municipal de Coccaglio (Brescia) de la Ligue du Nord. Il s’agit de ce qu’on appelle un split-screen, un dyptique où sont reproduites les photos d’un bébé singe à côté de la photo de Cécile Kyenge commenté par la légende suivante : « separate alla nascita » (« séparées à la naissance » : voir illustration 7).


En France, dans un scénario similaire, Christiane Taubira subit les attaques incessantes de l’opposition depuis son arrivée au pouvoir. Suspectée d’être une intruse de la République en vertu de son origine guyanaise (« Notre guyanaise de la place Vendôme »6), de ses combats indépendantistes et de sa loi dite mémorielle qui reconnait la traite des nègres et l’esclavage comme un crime contre l’Humanité, les partis et groupuscules extrémistes de droite ne cessent de réclamer sa démission sous n’importe quel prétexte fallacieux, le dernier en date (mai 2014) étant son refus de chanter la Marseillaise lors, justement, de la commémoration solennelle de l’abolition de l’esclavage. Comme en Italie, la ministre de la Justice essuie des accusations ad personam, parfois de manière détournée, surtout dans les journaux tels que Rivarol (« son déhanché d’obèse mal fagotée »7), Minute (« ah, si Taubira pouvait être une moule et en avoir le charisme »8) ou dans les post de ces mêmes journaux en ligne.
Quelques mois après le scandale suscité par l’affaire Kyenge en Italie, le 17 octobre 2013, l’émission populaire « Envoyé spécial » de France2 transmet un reportage intitulé « Les nouveaux visages du Front National » ; on y interroge une candidate du FN, Anne-Sophie Leclère, aux municipales de Rethel, dans les Ardennes, qui publie sur son journal Facebook un photomontage – en tous points similaire à l’italien décrit plus haut – où sont reproduites les photos juxtaposées d’un bébé singe et de Christiane Taubira avec les légendes respectives « à 18 mois » / « maintenant » (voir illustration 2).

2- Champs sémantiques des procédés métaphoriques

 
Même s’il n’est pas toujours aisé de les distinguer, nous avons pu relever deux sortes de procédés métaphoriques qui ne recouvrent pas exactement le même champ sémantique. En effet, nous avons relevé, d’une part, les attaques xénophobes à proprement parler, d’autre part des agressions verbales ouvertement racistes, les premières précédant les secondes aussi bien du point de vue temporel que du point de vue de l’impact perlocutoire des unités sémantiques et des constructions discursives à l’origine de la polémique. Si les premières dénotent une simple hostilité à l’égard de l’étranger, perçu comme ennemi et suscitant haine et peur (nous dit le Trésor de la Langue Française), les secondes renvoient à un ensemble de théories et de croyances qui établissent une hiérarchie entre les races ou les ethnies (ibid.). Ce sont ces dernières qui introduisent dans le débat public un fort dissensus, voire une rupture du dialogue démocratique, la dichotomisation des positions semblant alors irréductible (Amossy 2014).

2.1. Les métaphores xénophobes

 
Dans cette première catégorie nous pouvons inclure toutes les occurrences qui nient une quelconque légitimité de représentation politique à des ministres que l’on désigne comme appartenant à un exogroupe par rapport à une communauté nationale.
La volonté de neutraliser de manière systématique le rôle de la ministre du pays qu’elle représente est souvent bidirectionnelle, jouant sur le binôme classique, maintes fois relevé, Nous vs les Autres. Autrement dit, les tournures métaphoriques xénophobes sont souvent accompagnées d’affirmations qui explicitent tantôt une perspective nationale italienne endogène : « non siamo congolesi e abbiamo un diritto millenario fondato sullo jus sanguini »9, tantôt une perspective exogène10 : « La nomina l’immigrata congolese a ministro della Repubblica è la ciliegia sulla torta di un governo marchiato dall’ideologia mondialista del premier targato Bilderberg-Trilateral. ».11
Or, les mécanismes métaphoriques à finalité xénophobe se construisent autour d’une stratégie qui évoque l’ « ailleurs » par un « foyer étranger »  (Prandi 2002 : 11) mais qui sont reconnaissables. Le gouvernement dont Cécile Kyenge, italienne d’origine congolaise, fait partie est d’ailleurs baptisé « il governo bonga-bonga »12: dans ce syntagme le « foyer conceptuellement étranger » est représenté par l’expression néologique « bonga bonga ». D’un point de vue stylistique, le locuteur exprime cette métaphore avec l’intention de faire un calembour, un jeu de mots focalisé autour de l’assonance entre les termes « bunga » et « bonga ». Comme l’atteste le dictionnaire Treccani en ligne, le « bunga bunga » est un « après-dîner érotique »13 (une « partie fine » dirait-on en français) qui mêle l’élément sexuel aux renvois culturels de l’instrument musical « bongo » typique d’une Afrique tribale fantasmée14. Cette métaphore entraîne ainsi un transfert conceptuel étranger en tissant une sorte de périphérie métaphorique autour d’un même champ sémantique mêlant les traits /sexuel/, /fête/, /Afrique/, /tradition/, /exotisme/: « io capisco che le tradizioni tribali siano quelle […], il bonga-bonga […], si è sentito un tam-tam per tutte le tribù del mondo » 15.

2.2. Les métaphores sexistes

L’accession à des postes de responsabilité de deux femmes suscitent également des réactions de type sexiste, qui peuvent être considérées comme une sous-catégorie des attaques xénophobes : l’appartenance au genre féminin est un levier discursif qui sert d’attaque contre la ministre C. Kyenge. Celle-ci, docteur en médecine et ophtalmologiste, est désignée comme « la casalinga di Modena » ou bien comme « una brava casalinga ». Le déni de toute reconnaissance à assumer des tâches ministérielles se développe au profit d’un discours injurieux et stigmatisant. Le 14 juin 2013, une conseillère de la Lega Nord de Padoue, Dolores Valandro, lance un véritable appel au viol, en réaction à un épisode de violence sexuelle survenue à Gênes et s’exprime en ces termes: « Ma mai nessuno che se la stupri, così tanto per capire cosa può provare la vittima di questo efferato reato ? ».
Les métaphores de type sexiste peuvent parfois maintenir une visée explicitement xénophobe. À ce propos, on a vu circuler en Italie sur les réseaux sociaux un photomontage (illustration 616) paru sur la page Facebook de Fabio Rainieri le 22-10-2013, un député de la Ligue du Nord, qui montre deux photos juxtaposées verticalement : sur la première la photo C. Kyenge est commentée par la légende : « io sono italiana », tandis que sur la seconde photo on voit la pornostar, Cicciolina, ancienne députée du parti radical italien accompagnée de la légende « io sono vergine »17 . La structure explicite inférable à partir de cette image sous-tend une assertion conditionnelle contrefactuelle qui implique le mécanisme argumentatif suivant : « si C. Kyenge est italienne alors Cicciolina est vierge ». Or si la proposition conséquente est fausse, la proposition antécédente est également fausse : « comme Cicciolina n’est pas vierge, alors C. Kyenge n’est pas italienne » serait la conclusion implicitement déduite à partir de ce raisonnement logique de type enthymématique. Le processus métaphorique se construit donc sur l’attraction ou l’analogie non pas de deux champs sémantiques mais de deux raisonnements parallèles entraînant formellement le même type de conclusion.


De semblables insinuations xénophobes sont adressées en France à Christiane Taubira : « Notre guyanaise de la place Vendôme ». Cette indépendantiste, lit-on dans ce même article, « se fichait alors pas mal ‘l’intégrité du territoire’ »18. Dans le journal d’extrême-droite Rivarol (21-11-2013) : « contestée d’ailleurs même dans sa propre tribu, elle a tenté, avec l’aide d’apostats blancs, comme l’ancien maire de Nantes, de se fabriquer une sorte d’image de vierge historique de la Traite des nègres dont elle ne cesse de ressasser l’antienne acariâtre »19. Les attaques sexistes semblent moins trivialement frontales mais on relève au fil des pages « l’atrabilaire mégère », « la ministresse de la justice »20, avec une surféminisation du nom de métier, pour le moins ironique et dépréciative. Quant aux hypocoristiques bêtifiants et dénigratoires « Poupoule » ou « Dame Tautau »21, ils soustraient toute légitimité à la fonction institutionnelle de la Garde des Sceaux, selon les mêmes processus relevés pour son homologue italienne.

2.3. Les métaphores racistes

2.3.1. Le cas italien

Ce sont plus particulièrement ces métaphores qui suscitent la polémique et qui donnent naissance à l’évènement médiatique dans les deux pays au cours de l’année 2013. Les photomontages en question apparaissent à des moments différents : en Italie la polémique est déjà engagée lorsque la photo est publiée alors qu’en France c’est le photomontage montré dans une émission de grande écoute qui suscite une série de réactions politiques et médiatiques. Ces représentations iconiques cristallisent le fonctionnement du procédé métaphorique mais c’est le discours sous-jacent qui leur confère toute leur puissance évocatrice et, par conséquent, leur force « perlocutoire ». Nous reproduisons ici le discours de Roberto Calderoli qui sera suivi une semaine plus tard du photomontage décrit plus haut (voir illustration 7).

« […] il principio che noi abbiam sempre portato avanti: “aiutiamoli a casa loro” sia il principio più realista rispetto al ministro Kyenge veramente voglio dirgli sarebbe un ottimo ministro, forse lo è, ma dovrebbe esserlo in Congo non in Italia perché, se in Congo c’è bisogno di un ministro delle pari opportunità per l’integrazione, c’è bisogno là perché se vedono passare un bianco là gli sparano e allora perché non va là? Che mi rallegro/a un pochino l’anima perché rispetto a quello che io vivo… ogni volta, ogni tanto smanettando con internet apro “il governo italiano” ha dovuto tirar fuori la Kyenge [prononcé /kiŋ/] io resto secco io sono anche un amante degli animali per l’amore del cielo ho avuto le tigri, gli orsi, le scimmie e tutto il resto, i lupi anche c’ho avuto, però quando vedo uscire delle… non dico che… delle sembianze d’orango io resto ancora sconvolto non c’è niente da fare poi se giro la pagina cazzo...»22(Roberto Calderoli, 12-7-2013)

Le discours de l’italien R. Calderoli accumule dans une phrase de type asyndétique des référents hétérogènes qui pervertissent la perception d’une réalité socialement admise : la juxtaposition de substantifs désignant des animaux exotiques et féroces et de l’expression « sembianze d’orango » (« traits d’orang-outang ») sans désigner la ministre en question directement mais de manière détournée par ce qui pourrait constituer une métonymie, reconfigure une ontologie, une vision du monde travaillée par les mythes scientistes proprement racistes du XIXe siècle. La prononciation volontairement fautive du patronyme Kyenge transformé en [kiŋ] n’a rien d’aléatoire : même si nous forçons ici la stricte définition de la métaphore, nous pourrions considérer cette forme comme une translation du signifiant, une « prononciation métaphorique » c’est-à-dire un transfert de dénomination du nom propre (le thème) vers un nom « figuré » (le phore), le nom « King » étant inévitablement associé au personnage mythique du gorille King Kong.
Du reste, nous retrouvons dans le corpus italien des renvois interdiscursifs qui permettent au locuteur d’inférer une série d’implicites socio-culturels identifiables, admis par l’auditoire-cible. Le sénateur eurosceptique Mario Borghezio déclare sur Affaritaliani.it23, au sujet de la ministre C. Kyenge : « Faccetta nera dovrebbe sapere che nei regimi democratici dei Paesi occidentali tocca ai politici di opposizione fare provocazioni contro gli avversari e non ai ministri in carica che rappresentano, si fa per dire, il governo »24. La prédication « faccetta nera » pourrait être qualifiée d’enthymème : en effet, cette déclaration sous-tend ici une sorte de syllogisme incomplet dans lequel l’une des deux prémisses ou la conclusion est sous-entendue. Dans notre cas, la prémisse majeure (« La femme noire est une ‘faccetta nera’) et la prémisse mineure (« C. Kyenge est une femme noire ») sont effacées. Seule la conclusion reste lisible (« C. Kyenge est une ‘faccetta nera’ ») : bien que son aspect morphosyntaxique ne soit pas celui d’une phrase canonique, le syntagme figé « faccetta nera » condense les présupposés et les sous-entendus expliqués plus haut. Le rapport d’équivalence entre l’État italien colonisateur en Abyssinie et l’Italie contemporaine sous prétexte de la défense d’un statut des « régimes démocratiques » crée également une prémisse implicite. Dans la chanson fasciste de 1935, « faccetta nera » désigne une femme d’Abyssinie qui aurait dû être libérée de l’esclavage grâce à l’arrivée de l’État colonial italien. L’emploi de ce syntagme figé par le sulfureux député italien, dans une déclaration aux accents paternalistes, mobilise un arrière-plan discursif ayant une forte implication idéologique.

2.3.2. Le cas français

Quelques mois plus tard, la controverse suscitée lors de l’interview du 17 octobre 2013 par les déclarations de la candidate FN est comparable à celle provoquée par le sénateur italien. En voici la transcription complète :

Journaliste : - Que veut dire ce photomontage exactement ?
A.-S. Leclère :- Ben tout est dit entre les mots …Voilà elle arrive comme ça, elle débarque comme ça, franchement c’est une sauvage quoi... quand on lui parle de quelque chose de grave à la télé et aux informations n’importe où, elle vous fait un sourire, mais il faut voir!... un sourire du diable… Les personnes qui ont tué mais c’est pas grave on va leur mettre leur bracelet et puis ça sera déjà bien.
Journaliste :- Non parce que ce genre de comparatif des noirs avec des singes, ça fait partie quand même voilà de toutes les thématiques du racisme primaire …
A.-S. Leclère :- Non non ça n’a rien à voir, un singe ça reste un animal, un noir c’est un être humain ; j’ai des amis qui sont noirs et c’est pas pour ça que je leur dis que c’est des singes…
Journaliste :- Pourtant vous faites ce comparatif-là avec ce photomontage sur votre page… ? [la journaliste montre une photocopie couleur du photomontage en question].
A.-S. Leclère : - C’est plus par rapport à une sauvage que je l’ai fait, pas par rapport au racisme, aux noirs ou aux gris ou n’importe quoi. Là, c’est vraiment une sauvage, c’est une sauvage, voilà… À la limite, moi je préfère la voir dans un arbre après les branches que de la voir comme ça au gouvernement, franchement… !

Il serait tout d’abord nécessaire de distinguer entre l’interprétation que l’image en elle-même suscite et le chapelet de métaphores, agencements verbaux originaux, auquel elle a donné lieu ou qui l’ont accompagnée, entre signes iconiques et signes linguistiques. Les signes iconiques renvoient de manière apparemment plus directe à une référence, un objet du monde ; l’interaction entre les deux photos juxtaposées d’une part et l’attribution de sens par l’interprétant (au sens de Peirce) d’autre part confèrent à ce message iconique – commenté, ne l’oublions pas, par sa légende – une valeur sémiotique. Ainsi, la représentation iconique, en l’occurrence ici d’un bébé singe femelle, interprété comme tel grâce à ses attributs vestimentaires, typiquement féminins, est de type analogique par rapport à la réalité qu’il est censé reproduire ; la juxtaposition des deux photographies est, quant à elle, mimétique du transfert de sens, de la translation, de la superposition de deux ordres conceptuels ontologiques en conflit : l’espèce animale et l’espèce humaine. Il s’agirait donc bien là d’un processus métaphorique (Prandi 2002). Ce sont ces représentations iconiques, images ou photographies dont la particularité est d’avoir un impact visuel im-médiat d’où est exclue toute argumentation rationnelle, qui exacerbent le conflit et que nous nous proposons d’analyser. À ce titre, bien plus qu’une réappropriation linguistique par une nouvelle caractérisation sémantique, l’image se donne à voir dans sa violence désignative, « située dans l’éternel présent des faits de pure essence » (Charbonnel 1991 : 44)25. Les commentaires de la candidate frontiste actualisent le sens qu’il faut attribuer à ces images.
La première figure qui s’exprime dans la citation que nous analysons est la métaphore in praesentia « c’est une sauvage ». Le phore « sauvage » associé au thème « Christiane Taubira » signifie l’appartenance de la personne à une catégorie, à l’espèce des « sauvages ». Dans l’esprit de la candidate frontiste, le signifié de « sauvage » est-il vraiment perçu / utilisé comme une figure, comme on le prétend dans les articles qui l’ont défendue ? Le commentaire justificatif « à la limite, moi je préfère la voir dans un arbre après les branches » est une phraséologie qui enjoint rétroactivement l’interprétation de la prédication métaphorique « sauvage » dans son sens littéral de « individu non humain, non civilisé, primitif ». On peut considérer ici la modalisation « à la limite » comme un mitigeur destiné à préserver la face de la journaliste et celle du téléspectateur, n’affectant en rien la réelle teneur sémantique de cet énoncé, et que les linguistes appellent justement « la valeur de vérité ».
La prédication de la métaphore « c’est une sauvage » est à relier avec une chaîne isotopique identifiable dans les discours d’extrême-droite ou, comme on dit euphémiquement, de la droite radicale. En effet, un article de Rivarol, paru immédiatement après l’épisode médiatique qui nous occupe ici, s’intitule « l’ordre sauvage des barbares » (« nous nous faisons gouverner par des barbares et c’est l’ordre sauvage des barbares qui s’installent »26) ; les formules (au sens de Krieg-Planque) telles que « l’immigration sauvage », « la mondialisation sauvage », répétées à l’envi dans ces mêmes discours, constituent un parcours interdiscursif qui se développe autour d’un thème paradigmatique où ces parasynonymes tissent l’isotopie du désordre, du dérèglement, de la subversion de l’ordre de la nature.
L’expression emphatique « elle vous fait un sourire, mais il faut voir !... un sourire du diable… » confirme, selon nous, ce positionnement. En effet, cet énoncé contient un cliché verbal indiquant un haut degré ou une marque de notoriété. Dans tout autre contexte, cette métaphore lexicalisée, ou catachrèse, pourrait en effet être interprétée, selon l’acception endoxale, comme synonyme de « un sourire extraordinaire » dont le sens est axiologiquement marqué vers un pôle positif. Mais dans un discours axé sur une visée argumentative polémique, contenant même des attaques ad personam contre Christiane Taubira, le cliché doit être interprété para-doxalement selon son sens littéral : il s’agit bien, ici, d’évoquer à proprement parler, le sourire du Diable.
De même, nous relevons dans un article commentant ce même épisode à l’origine du dissensus : « même si la plupart auront été plus sensibles au regard émouvant du petit animal [le bébé chimpanzé] qu’à l’habituel rictus … carnassier de l’atrabilaire mégère »27. L’apparition de l’expression « rictus… carnassier » n’est certes pas anodine, comme le suggère les points de suspension précédant l’adjectif épithète, qui sont en fait une injonction à la lecture autonymique du vocable annoncé. L’acception est cette fois non seulement clairement connotée péjorativement, mais elle s’inscrit dans une isotopie sémantique recoupant les champs lexicaux relatifs au diable, à la puissance démoniaque, au renversement, à la conversion (voir plus haut la métaphore des « apostats blancs »); rappelons incidemment que les campagnes contre les mesures présentées par C. Taubira thématisent « l’inversion des valeurs », thème aux relents nietzschéens. Ainsi, dans cette expression, l’adjectif « carnassier » est remotivé par réactualisation des sèmes /voracité/, /animalité/ ou même /carnivore/. Pour certains représentants de l’extrême droite, Christiane Taubira est l’incarnation du diable. On relèvera ailleurs par exemple « la volonté satanique du gouvernement d’imposer le ‘mariage’ homosexuel »28, « c’est toujours la même clique de démons qui montre sa face »29. Ces chaînes sémantiques renvoient en écho au livre programmatique de Marine Le Pen qui se réfère à l’économie de marché en parlant d’« économie du diable » voire avec l’emploi de la majuscule, de « l’économie du Diable »30: la figure métaphorique prépositionnelle de la première expression alterne significativement avec un syntagme où la spécification « du Diable » est à entendre dans son « sens propre », ou sens dénotatif, son signifié structural dans ses composantes autonomes (Prandi 1992 : 139). Nous le constatons, la distinction entre sèmes inhérents (hérités par défaut) et sèmes afférents (actualisés en contexte) s’avère délicate en raison justement de l’hésitation prédicative que nous venons d’expliciter : par « sourire du diable » entendait-on « sourire du Diable » ? « En face du Noir, le Blanc contemporain ressent la nécessité de rappeler la période anthropophagique », dit F. Fanon (1952 : 246) : par « sourire carnassier » entendait-on « sourire d’anthropophage » ?
Les expressions métaphoriques que nous venons d’identifier relèvent de l’amphibologie. En l’occurrence ici il s’agit de syllepses qui sous-tendent une ambiguïté énonciative voulue et recherchée dans les discours d’extrême droite en général. En effet, ceux-ci semblent particulièrement privilégier les vocables aux acceptions douteuses 31. Souvent délibérément proférés avec cynisme, ils donnent lieu à des tergiversations sur le sens « véritable » ou « (non) intentionnel » qu’il faudrait leur attribuer ou un sens qu’il faudrait saisir comme relevant du « second degré ». C’est toute une activité discursive de type autonymique qui s’exerce ainsi, une activité déconstructionniste quasi-pathologique qui constitue l’un des traits idiosyncrasiques du discours d’extrême-droite.32
C’est pourquoi, on ne saurait se contenter d’une stricte analyse linguistique pour déterminer les valeurs sémantiques que l’opinion publique a attribué à ces métaphores, et qui sont à l’origine des réactions médiatiques. Il ne s’agit pas ici d’une création néologique servant à dénommer une nouvelle réalité sur la base d’une ressemblance mais bien de réactiver des images relatives à toute une iconographie coloniale et par là, de réhabiliter le contexte historico-culturel qui l’a engendrée. Des articles ont paru pour minimiser la portée idéologique de ces propos et de ces actes (le photomontage publié sur Facebook) qualifiés par Rivarol et Minute de « blague de potache » ; les articles persistent dans l’évocation renouvelée de stéréotypes à la fois provocateurs et outrageants : la langue estropiée des Noirs parlant le « petit-nègre » dans « y’a pas bon Taubira » (expression paronymique du célèbre slogan « y’a bon Banania »33) ; la description des nègres de manière métonymique comme des mangeurs de bananes : sous la fameuse Une de Minute du 13 novembre « Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane », toute une série d’articles déploie pêle-mêle, de manière provocatrice, toutes les expressions figées, clichés ou boutades contenant le vocable « banane »34 . L’allusion ironique se transforme en allusion cynique qui exalte, comme le disait en son temps Frantz Fanon,  « l’imposition culturelle irréfléchie », au lieu de la combattre :

« Dans l’inconscient collectif de l’homo occidentalis, le nègre, ou, si l’on préfère, la couleur noire, symbolise le mal, le péché, la misère, la mort, la guerre, la famine. Tous les oiseaux de proie sont noirs. […] L’inconscient collectif n’est pas dépendant d’un héritage cérébral : il est la conséquence de ce que j’appellerai l’imposition culturelle irréfléchie. » (FANON 1952 : 216)

L’hétérogénéité montrée dans les discours analysés induit l’interprétation équivoque, une ambiguïté inhérente, en un certain sens, à la figure métaphorique : la photographie de la guenon au côté de celle de C. Taubira peut être lue – avec beaucoup de mauvaise foi – comme « une pauvre photo d’un petit ouistiti mignon »35. Reconnaître le poids sémantique charrié par ces figures, c’est reconnaître toute une idéologie proprement raciste que notre culture occidentale a gardée en mémoire et qui est réactivée dans les représentations discursives et iconographiques des partis d’extrême-droite. Les classifications hiérarchiques des « races humaines » affirmaient selon des critères scientifiques admis jusqu’au début du XIXe siècle que le chaînon manquant entre les hommes blancs et les orangs-outangs ou les grands singes étaient les Noirs (voir figure 1) ; il va de soi que les premiers étaient privilégiés par la nature (donc par Dieu) et qu’ils avaient une prédisposition innée pour la beauté, l’intelligence, les proportions équilibrées, bref pour une civilisation supérieure36. Dans un article de Libération daté du 6 novembre 2013, l’écrivaine Christine Angot, a beau jeu de filer la métaphore sans déterminer l’origine de la force perlocutoire de l’insulte en question, une force due précisément au pouvoir allusif de la métaphore : « nous ne savons pas nous défendre, nous sommes des singes muets, mais si nous étions des singes au moins nous pourrions leur faire des grimaces […] ». Déplorant le manque de réaction de la part des intellectuels, C. Angot exprime son indignation, cette « émotion vertueuse » ou forme édulcorée de la polémique (AMOSSY 2014 : 155) mais elle n’identifie pas la véritable visée intentionnelle habilement détournée et déniée par les discours que nous venons d’analyser et qui sont éthiquement inadmissibles.

Conclusion

L’étude des figures métaphoriques ne peut se contenter d’une stricte opération d’analyse linguistique formelle. Ces figures, souvent accompagnées d’autres tropes, et intégrées dans un développement argumentatif caractéristique des discours d’extrême-droite peuvent susciter des réactions politiques, civiles ou sociales qui en font un véritable évènement médiatique, comme dans les cas des attaques adressées à deux ministres noires de nos Républiques démocratiques, la France et l’Italie. Nous avons pu mettre en évidence comment le débat politique peut s’articuler autour de tergiversations métalinguistiques quant aux présupposés sémantiques de telle ou telle métaphore jugée xénophobe, sexiste ou raciste. La présence même du trope de la métaphore, que ce soit dans la monstration d’illustrations iconiques ou dans les déclarations politiques publiques, peut à la limite être remise en question si l’on prend soin de resituer ces discours dans une perspective historique et de rétablir la réelle visée intentionnelle des énonciateurs qui les utilisent. C’est pourquoi, pour déterminer leur véritable portée, il est nécessaire de dépasser une conception strictement référentialiste du sens afin de les intégrer dans leur contexte à la fois historique et culturel qui leste les mots d’un certain poids sémantique et de valeurs (inter-) discursives spécifiques.

Bibliographie/Références

R. AMOSSY, Apologie de la polémique, Paris, PUF, 2014.
R. AMOSSY, L’argumentation dans le discours, Paris, Armand Colin, 20092.
E. BORDAS, Les chemins de la métaphore, Paris, PUF, 2003.
N. CHARBONNEL, Les aventures de la métaphore, Presses Universitaires de Strasbourg, Strasbourg, 1991.
J. GARDES TAMINE, Au cœur du langage la métaphore, Honoré Champion, 2011.
F. FANON, Peau noire, masques blancs in F. Fanon, Œuvres, Paris, La découverte, 2011 [1952].
C. PLANTIN, L’argumentation, Paris, Seuil, 1996.
M. PRANDI, « La métaphore: de la définition à la typologie », Langue française 134, pp. 6-20,2002.
F. RASTIER, « Heidegger aujourd’hui – ou le mouvement réaffirmé », in E. Faye (dir.), Heidegger – Le sol, la communauté, la race, Paris, Beauchesne,2014, pp. 267-306.
F. RASTIER, « Sémiotique des sites racistes », Mots 80, pp. 73-85.
F. RASTIER, « Tropes et sémantique linguistiques », Langue Française 101, pp.80-101
P. SCHULZ, « Le caractère relatif de la métaphore », Langue Française 134, 2002, pp.21-37.
P.-A. TAGUIEFF, Le Racisme – Un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir, Flammarion, Paris, 1997.

Illustrations

sini modena 1 bis

1-« L’angle facial des espèces », in Julien-Joseph Virey, Histoire naturelle du genre humain, Paris, 1801, t. 2. (Photo : Bibliothèque interuniversitaire de médecine);

	
  
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2-Photomontage paru sur la page FB de la candidate frontiste A.-S. Leclère;

	
  
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3- Affiche de 1931 invitant à visiter un “zoo humain” au Jardin d’acclimatation de Paris.

	
  
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4- Montage d’une élue UMP C. Declerck, parue sur son profil FB;

	
  
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5- Mur tagué signé Forza Nuova;

	
  
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6- Photomontage sexiste de Fabio Rainieri;

	
  
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7- Photomontage signé Roberto Calderoli.

	
  

Note

↑ 1 Même si cette étude est le fruit d’une étroite collaboration, Silvia Modena s’est occupée plus spécifiquement du corpus italien et de l’affaire Kyenge tandis que Lorella Sini a analysé plus particulièrement le corpus français et l’affaire Taubira.

↑ 2 Nous reportons entièrement ci-après l’occurrence: « Ma il cavallo di Troia non insegna nulla ? La congolese al governo rappresenta il cavallo in questione ! » (SMS du 20-6-2013 à la rubrique « A tutto volume » dirigée par Alessandro Morelli dans La Padania).

↑ 3 La première expression est tirée de l’article du 12/13 mai 2013 qui reprend la déclaration faite par Matteo Salvini le lendemain de l’affaire Kabobo, un clandestin ghanéen ayant tué plusieurs personnes: « I clandestini che il ministro di colore vuole regolarizzare ammazzano a picconate » . La seconde expression est tirée de la rubrique « A tutto volume » dirigée par Alessandro Morelli du 13-6-2013.

↑ 4 Cf. courrier des lecteurs de la Padania du 1-8-2013 où il est question de « physionomie », de « fruits exotiques », de « ministre afro-italienne » et de « coups de bananes » : « […] Vorrei contrastare la Kyenge sull’argomento jus soli o sul reato di clandestinità, non con le battute sulla sua fisionomia o sui frutti esotici. » Réponse de Camilla, responsable du courrier des lecteurs: « certo è che l’incompetenza e l’inconsistenza devastante della signora ministro afro-italiana non si combatte certo a bananate».

↑ 5 Voir l’illustration numéro 1 qui affiche le slogan suivant : « Kyenge torna in Congo » ; en jouant sur l’allitération des consonnes k/c, n et g. Ce slogan, signé par le rassemblement italien d’extrême droite « Forza Nuova » adopte, selon une perspective sémiotique tout à fait cohérente, une police de caractères typique des slogans fascistes des années 30.

↑ 6 Minute 13-11-2013.

↑ 7 Rivarol 21-11-2013.

↑ 8 Minute 20-11-2013.

↑ 9 M. Borghezio, Radio 24, La Zanzara, 22-5-2013.

↑ 10 L’occurrence suivante, tirée d’un tweet publié par le ministre Calderoli le 14-7-2013 dans la version web de la Padania, renvoie au même mécanisme : « e allora mi pare corretto che in democrazia uno possa criticare apertamente chi ci vuole imporre, venendo da fuori, qualcosa che non rientra nel nostro modo di pensare e di vivere ».

↑ 11 ANSA - communiqué par le journal en ligne : Padania e libertà, 29-4-2013.

↑ 12 Le syntagme « bonga-bonga » est tiré des déclarations que l’eurodéputé Borghezio a faites lors d’une interview à l’émission « La zanzara » le 22 mai 2013.

↑ 13 Cette expression inaugurée par Silvio Berlusconi et popularisée par les médias lors de ses différents procès : « Silvio (lo chiamo Silvio e non Papi come gli piacerebbe essere chiamato) mi disse che quella formula – “bunga bunga” – l’aveva copiata da Gheddafi: è un rito del suo harem africano ». (Piero Colaprico e Giuseppe D’Avanzo, Repubblica.it, 28-10-2010).

↑ 14 Le dictionnaire Treccani explique ainsi la duplication du vocable « bunga » : « Composto dalla duplicazione del s. m. bunga, che si inserisce in una serie scherzosa, e spesso spregiativa, di nomi e locuzioni riferiti a usi, costumi, danze, canzoni, strumenti musicali (bongo ‘strumento a percussione’ è voce di origine africana), propri di un’immaginaria Africa tribale. »

↑ 15 M. Borghezio, Radio 24, La Zanzara, 22-5-2013.

↑ 16 Il nous a été impossible de reproduire en entier l’illustration originale qui n’est plus disponible sur les sites internet.

↑ 17 Il s’agit d’une reprise paronymique d’un chant de supporters de la Lazio de Rome qui dit: « se la Roma è magica, Cicciolina è vergine ».

↑ 18 Minute 13-11-2013.

↑ 19 Rivarol 21-11-2013.

↑ 20 Ibid.

↑ 21 Minute 13-11-2013.

↑ 22 « […] Je reste bouche bée, je suis moi-même un ami des animaux, pour l’amour du ciel, j’ai eu des tigres, des ours, des singes et tout le reste, des loups aussi j’ai eus, mais quand je vois sortir des… traits d’orang-outang, j’en suis bouleversé … » (enregistrement audio amateur sur Youtube https://www.youtube.com/watch?v=oIUDIynQZ0E consulté le 30 juin 2014)

↑ 23 Propos rapportés par le journal La Padania du 3-9-2013.

↑ 24 « Faccetta nera devrait savoir que dans les régimes démocratiques des pays occidentaux, c’est aux politiques d’opposition de faire des provocations contre les adversaires et non aux ministres en charge qui représentent, si on peut dire, le gouvernement ».

↑ 25 N. Charbonnel (1991) applique en réalité cette définition au processus métaphorique en général mais elle nous semble plus particulièrement adaptée pour les représentations iconiques.

↑ 26 Rivarol 21-11-2013.

↑ 27 Ibid.

↑ 28 Rivarol 1-2-2013.

↑ 29 Post du 17-11-2013 du site Égalité et Réconciliation à propos de cette même affaire Taubira.

↑ 30 M. Le Pen, Pour que vive la France [téléchargeable en ligne], respectivement p. 44 et p. 48.

↑ 31 Le dernier en date est la boutade de Jean-Marie Le Pen: « On en fera une fournée ! » en se référant à des personnages médiatiques d’origine juive.

↑ 32 C’est systématiquement le cas par exemple dans l’énonciation des patronymes, dans l’obsession orthonymique, la recherche sans fin de l’origine des noms (surtout, évidemment, de ceux à consonance hétéroglosse). À l’heure où l’on relit de manière beaucoup plus critique Heidegger, nous nous apercevons combien le « spectre » de ce philosophe et de cette posture déconstructionniste, influe sur les mouvements d’extrême-droite européens en général et français en particulier (cf. Rastier 2014).

↑ 33 Voir figure 4.

↑ 34 Minute, 13-11-2013.

↑ 35 Rivarol, 21-11-2013.

↑ 36 Ces réflexions peuvent être analysées également dans le corpus italien. En octobre 2013, le journaliste de la Padania Andrea Ballarin cite les affirmations de Giuseppe Fornoni, conseiller adjoint de la Lega Nord à Lograto (Brescia) : « per quanto riguarda il ministro Kyenge – conclude Fornoni – prima di insegnare l’educazione ai popoli del nord, la insegni ai suoi simili che violano le nostre leggi per entrare illegalmente nel nostro paese ». « pour ce qui concerne le ministre Kyenge – conclut Fornoni – avant d’enseigner l’éducation aux peuples du nord, qu’elle l’enseigne à ses semblables qui violent nos lois pour entrer illégalement dans notre pays ». L’expression « simili » (« semblables ») relève d’une rhétorique ségrégationniste assimilant des êtres humains (noirs) à l’espèce animale (les singes).

 

Dipartimento di Lingue e Culture Moderne - Università di Genova
Open Access Journal - ISSN 1824-7482