Publifarum n° 39 - Publifarum

Apprentissage en UPE2A-collège en France : des dispositifs hétérogènes et contraignants pour les élèves migrants allophones

Julie Prévost



Abstract

Francese  | Inglese 

L’institution scolaire française a progressivement modifié les modalités d’accueil des apprenants migrants allophones depuis les années 1970. Si les textes vont dans le sens d’une inclusion – tant dans la dénomination des structures que pour la catégorisation des apprenants – sur le terrain, les modalités de sa réalisation ne sont pas toujours efficientes. Comme l’École ne peut pas, seule, résoudre les inégalités scolaires (liées notamment à la géographie des territoires et aux flux migratoires), il apparait nécessaire de repenser l’allophonie pour modifier le regard des enseignants sur ce public spécifique et hétérogène et renouveler leurs pratiques. Si l’effet classe, l’effet maître ou l’importance du climat scolaire ont été démontrés, l’effet établissement, difficilement quantifiable, apparait comme un levier pour inclure de manière efficiente les élèves allophones.


Introduction

En France, l’évolution de l’École est liée aux décisions gouvernementales, en dépit des alternances ministérielles. Elle dessine, en creux, les transformations et les préoccupations sociales – dont la place de la langue française, chargée d’une mission sociale. 

Dans une perspective sociolinguistique et didactique, nous proposons ici de revenir sur l’enseignement-apprentissage du français langue seconde (FLS) depuis les années 1970, date du début de la scolarisation dédiée aux enfants migrants en France. Si l’institution a renouvelé les modalités d’accueil des apprenants allophones pour modifier les pratiques professionnelles, leur réalisation ne sont pas toujours efficientes et ne conduisent pas systématiquement à une inclusion, d’autant que « [La] dissonance du modèle réglementaire au fondement de la politique de l’État est source de conflits d’interprétation de la part des acteurs concernés, produisant des agencements institutionnels à l’échelle académique » (ARMAGNAGUE, 2023 : 61).

Nous proposerons d’abord – à partir de nos données de thèse (PREVOST, 2021) – une brève synthèse diachronique des dispositifs mis en œuvre dans l’enseignement secondaire en France au regard des Circulaires car ils sont les référentiels dans le système scolaire inclusif. Les lexies reflètent l’évolution de la politique scolaire linguistique et font écho aux préoccupations politiques et sociales françaises, et, comme l’a montré Auger, « illustrent la trajectoire d’une catégorie aux prises avec la notion d’expertise » (AUGER 2019). Ensuite, nous traiterons de l’inclusivité de l’école française, paradoxalement inégalitaire voire ségrégative (MERLE 2012 ; GOÏ & BRUGGEMMAN 2013). Des travaux de recherche montrent en effet que les modalités de la scolarisation des enfants migrants catégorisés comme allophones aboutissent globalement à une scolarité incomplète (CORTIER ; 2007), calibrée ou entravée (GUEDAT-BITTIGHOFFER 2015 ; ARMAGNAGUE et al. 2019) puisqu’elles limitent la prolongation de la scolarité (DEAUVIEAU & TERRAIL,2020) d’autant que la pandémie mondiale a accru les inégalités entre publics scolaires (GOUDEAU et al. 2021) et que les pratiques n’évoluent guère malgré les injonctions institutionnelles paradoxales (GUEDAT-BITTIGHOFFER et al. 2021 ; PREVOST, 2021). Enfin, dans une démarche épistémologique, nous partagerons quelques propositions issues de notre thèse (PREVOST, 2021) pour repenser l’allophonie en didactique et dans son expression – la désignation déterminant les choix éducatifs – afin que les dispositifs d’apprentissage du FLS en contexte migratoire dans le secondaire français soient plus efficients. 

Synthèse des dispositifs d’accueil d’enseignement-apprentissage (1970-2022) et modalités de scolarisation

Classes et dispositifs 

Les derniers rapports sur l’École française indiquent qu’après une évolution exponentielle1 (MENDONÇA DIAS & RIGONI 2019), le nombre d’élèves allophones scolarisés recensés a diminué de 5%2. En 2019-2020, ils étaient 67909 élèves entrants (MEN-DEPP, 2020) mais 64564 scolarisés en métropole en 2020-2021, (28 748 dans des écoles élémentaires, 25 962 dans des collèges et 9 854 dans des lycées). Les élèves allophones nouvellement arrivés (EANA) représentent 7,6‰ élèves dans les collèges et 4,4‰ dans les lycées. (MEN-DEPP, 2022).

La prise en charge spécifique de ces élèves date des années 1970. Avec la crise économique, la France ferme ses frontières à l’immigration de travail et la plupart des migrants choisit de rester dans l’Hexagone et de faire venir sa famille. Dès lors, des besoins éducatifs nouveaux apparaissent. Il est intéressant de relire les textes institutionnels car ils montrent l’évolution de l’École (intégrative puis inclusive) et de l’enseignement dédié aux élèves migrants, dans ses dimensions didactique et sociale, lesquelles éclairent l’enseignement-apprentissage actuel du FLS en France. 

La Circulaire IX-70-37 du 13 janvier 1970 (Classes expérimentales d’initiation pour enfants étrangers) marque un tournant pour l’enseignement. Toutefois, l’ouverture de ces classes est circonscrite au nombre d’enfants étrangers qui aurait un impact sur l’apprentissage « par imprégnation naturelle » et leur âge : « lorsque le nombre d’étrangers n’excède pas quatre ou cinq par classes et qu’ils sont très jeunes ». À partir de quatorze ans, ils sont scolarisés dans une classe de l’Amicale pour l’enseignement des étrangers ou dans une classe de fin d’études avec aménagement d’un tiers-temps consacré à l’apprentissage du FLS. Parallèlement, la formation des enseignants spécialisés voit le jour avec les CEFISEM (Centre de Formation et d'Information pour la Scolarisation des Enfants de Migrants)3.

La Circulaire 73-383 du 25 septembre 1973 entérine la Scolarisation des enfants étrangers non francophones, arrivant en France entre 12 et 16 ans et les classes d’adaptation (CLAD) pour un enseignement-apprentissage accéléré de la langue et une mise à niveau scolaire. Il s’agit de structures majoritairement fermées. Les élèves de quatorze ans qui ne peuvent pas « rattraper le niveau » sont orientés en collège d’enseignement technique (CET)4 en classe préprofessionnelle ou préparatoire à l’apprentissage. Ils bénéficient d’un soutien à la condition qu’il soit possible de former un groupe de cinq élèves minimum. Comme il leur est déconseillé de suivre les cours de langues vivantes (LV), la poursuite d’études dans l’enseignement général est impossible, ce qui présente une contrainte forte en termes d’orientation scolaire. 

En 1977, la notion de besoins pédagogiques particuliers émerge. L’article 2 de la Directive européenne du 25 juillet 1977 préconise pour les enfants de moins de 16 ans « [...] un enseignement d’accueil gratuit comportant notamment l’enseignement adapté aux besoins spécifiques de ces enfants, de la langue officielle ou de l’une des langues officielles de l’État d’accueil » (Circulaire européenne 77/486/CEE, article 2). 

La Circulaire 86-119 du 13 mars 1986 Apprentissage du français pour les enfants étrangers nouvellement arrivés en France souligne le caractère temporaire de la structure d’accueil pour éviter les scolarités cloisonnées. Pour écarter l’orientation forcée, la double inscription (administrative dans la classe correspondant à l’âge de l’apprenant et pédagogique) est créée. 

En 1999, une forte augmentation du nombre d’enfants allophones5 est observée. Les Centres académiques pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs (CASNAV) remplacent les CEFISEM et la Circulaire 2002-100 du 25 avril 2002 organise la Scolarité des élèves nouvellement arrivés en France sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissages

Une décennie plus tard, c’est la Circulaire 2012-141 du 2 octobre 2012 (Organisation de la scolarité des élèves allophones nouvellement arrivés) qui fixe les conditions de scolarisation en dispositif d’apprentissage avec « souplesse » et « personnalisation des parcours », y compris pour les élèves « âgés de plus de 16 ans ne relevant pas de l’obligation d’instruction ». Elle constitue toujours le référentiel des unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants (UPE2A) déployées progressivement dans le secondaire. Ce sont des dispositifs pensés comme inclusifs. Dans notre thèse (PREVOST,2021) nous avons relevé un glissement de sens entre le principe (la double inscription avec affiliation dans une classe régulière) et ses effets (une didactique inclusive). Pour Tremblay, l’école inclusive ne saurait se substituer à l’enseignement ordinaire sans différenciation des pratiques : 


L’inclusion ne se limite pas à la simple présence physique d’un élève à besoins spécifiques en enseignement ordinaire, mais concerne également et surtout les mesures que l’école ordinaire met en place pour favoriser l’apprentissage et la socialisation de cet élève. Cela implique, bien entendu, la mise en place d’une différenciation, d’adaptations et de modifications raisonnables qu’il convient de justifier. (TREMBLAY cité par MEN-ÉDUSCOL 2016 : 4)

Le lexique utilisé dans les circulaires reflète également une réflexion institutionnelle et la volonté de faire changer les pratiques. Le langage ne suffisant pas à impulser une pédagogie, il doit toutefois être accompagné d’un renouvellement : déploiement de formations pour les enseignants. 

Termes et expressions désignant les apprenants 

Il conviendrait ici de compléter ce relevé diachronique par l’analyse des termes et expressions successivement utilisés par l’institution pour désigner les apprenants. La dénomination, outre le fait de refléter les préoccupations politiques et sociales françaises, influence considérablement voire détermine la différenciation didactique. Les élèves ont été catégorisés comme « enfants étrangers » (1970), « non francophones » (1973), « nouvellement arrivés en France », « ENAF » (pour « enfant nouvellement arrivé en France ») (1986), « primo-arrivants » (1999) ou « allophones », « nouvellement arrivés en France sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissage » (2002), « allophones nouvellement arrivés » (2012). Il apparait que l‘institution a cherché à catégoriser ce public pour qui elle préconise un enseignement adapté6. Cependant, cette profusion de termes prête à confusion, provoquant une forme d’escalade terminologique qui introduit des confusions entre des approches sociologiques, sociolinguistiques et leurs enjeux didactiques. L’épithète « allophone » a sans doute été choisie dans une visée de catégorisation linguistique, s’agissant de préconisations didactiques en lien avec les modalités du cours ordinaire de français7 – où le professeur enseigne la langue, la littérature et la culture française et que l’allophone est celui qui parle (une ou) d’autres langues8. Le qualificatif ne distingue plus les apprenants dans le cadre d’une problématique xénologique ou sociale, mais ne définit pas clairement les contours de cette dénomination. Marchadour observe que « le terme “allophone” revient [dans la Circulaire] à quarante et une reprises, mais n’est jamais vraiment défini. » (MARCHADOUR 2019 : 68). Dans la Note d’information n°19-52 produite par la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) qui fait le bilan sur les « jeunes ayant des besoins éducatifs particuliers dans le domaine de l’apprentissage du français langue seconde » au cours de l’année scolaire 2017-2018, on trouve les expressions « enfants nouvellement arrivés en France », « enfants allophones », « élèves allophones », « les jeunes allophones », « les collégiens allophones », « les lycéens allophones », « les allophones scolarisés », « les allophones ». On le voit, le terme, adjectivé ou substantivé, est labile. 

Ces termes et expressions apparaissent comme des marqueurs de catégories qui se sont, « en quelque sorte “cristallisées” par ces sigles qui masquent l’histoire de leur émergence » (CASTELLOTTI 2009 : 109). Pour Galligani, « quiconque s’intéresse à la question de la scolarisation des enfants étrangers en France se heurte d’emblée à un panel d’expressions qui agissent comme marqueurs des attributs catégoriels et statutaires que l’on reconnaît à cette portion d’élèves. » (GALLIGANI 2012 en ligne).

Impatience institutionnelle 

L’étude des textes officiels montre également une « impatience institutionnelle » (PREVOST 2021) pour la normalisation de la scolarité des enfants allophones. Déjà en 1973, il est préconisé d’« insérer le plus rapidement possible […] dans un cycle d’études normal » les « enfants étrangers » (Circulaire 73-383). 

En 1986, le concept intégratif modélise la scolarisation sous-tendue à la rapidité de la démarche : il est désormais nécessaire de « réaliser l’insertion complète des élèves non francophones dans le cursus normal le plus rapidement possible » (Circulaire 86-119 du 22 mars 1986). La formule préconisant un empan chronologique limité sera d’ailleurs reprise en 2012 : « Cette inclusion passe par la socialisation, par l'apprentissage du français comme langue seconde dont la maîtrise doit être acquise le plus rapidement possible […] ». (Circulaire n°2012-141 du 2-10-2012). Entre temps, la Circulaire DMP/Cl199-315 du 1er juin 1999 portant sur la Mise en œuvre de la politique d’accueil des primo-arrivants avait substitué la rapidité par la notion d’efficacité. Il s’agissait de « mettre en place une politique d’accueil efficace ». En 2002, le texte institutionnel précisait qu’il convenait d’« assurer dès que possible l’intégration dans le cursus ordinaire ». Gattolin rapporte à ce sujet que le temps de scolarisation en dispositif UPE2A est globalement insuffisant : 


[u]ne fois l'année scolaire écoulée, nombre des élèves scolarisés en UPE2A ont des acquis fragiles qui demanderaient à être consolidés au long d'une seconde année. S'ils sont parfois « gardés » en UPE2A c'est grâce à un emploi du temps adapté, ce qui n'est pas toujours possible (GATTOLIN 2016).

L’impatience institutionnelle à « inclure » rapidement les élèves allophones en classes ordinaires perdure. Elle découle de la paradoxale prescription d’une distinction non stigmatisante que Cortier a relevée : 


La réitération, dans les textes officiels, de l'obligation de restreindre l'accès des structures spécifiques aux élèves nouvellement arrivés en France (ENAF) et de limiter la durée de leur séjour dans ces classes peut être interprétée comme une volonté de lutter contre une tendance « ségrégative » existant dans les établissements, à faire des classes d'accueil traditionnelles des classes reléguées ou des filières d'une part et, d'autre part, comme une volonté d'éviter l'assimilation entre enfants nouvellement arrivés et enfants ou petits-enfants d'immigrés nés en France. (CORTIER, 2007 : 140)

Plusieurs études (BRUGGEMAN 2016 ; GUEDAT-BITTIGHOFFER 2015 ; MENDONÇA DIAS 2020) montrent que cette temporalité – largement insuffisante – se réalise de manière hétérogène selon le lieu de scolarisation. 

Conditions de scolarisation hétérogènes pour une scolarité contrainte ou entravée

Les conditions hétérogènes de scolarisation sont liées à la corrélation de plusieurs facteurs : la géographie des territoires et des flux migratoires, la carte scolaire et les politiques urbanistes ainsi que les budgets alloués au public allophone (PREVOST 2021, 2022).

Les entrées sur le territoire français métropolitain se dessinent principalement depuis la Méditerranée et selon des trajectoires Est-Ouest et Sud-Nord. La localisation des UPE2A suit globalement cet axe avec une disparité entre les régions de l’Est et de l’Ouest, notamment entre la Bretagne, les Pays de la Loire, la Basse-Normandie, l’Ouest de l’Aquitaine et la Région Grand-Est, la Bourgogne-Franche-Comté, la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ainsi, les académies de Paris, de Créteil, d’Amiens, de Strasbourg, de Nancy-Metz, de Lyon, de Poitiers, de Toulouse et d’Aix-Marseille scolarisent un nombre important d’élèves allophones avec une disparité de prise en charge : 


[En 2017] six départements scolarisent très peu (moins de 15 %) d’élèves allophones dans un dispositif UPE2A (y compris UPE2A-NSA - Indre, Morbihan, Mayenne, Meuse, Dordogne et Martinique). Il s’agit de départements accueillant chacun moins de 350 élèves allophones. À l’inverse, dans certains départements (Manche, Hauts-de-Seine, Paris, Aube, Ain, Marne et Seine-Saint-Denis), ils sont quasi exclusivement scolarisés en UPE2A (plus de 90 %). (MEN-DEPP, 2019 : 4) 

Cartes 1 et 2: Présence des allophones sur le territoire (métropole + DOM) en 2014 et 2019 (DEPP)

La disparité des UPE2A est à corréler aux flux migratoires. Leur localisation répond à des besoins pédagogiques de scolarisation et dépasse les compétences des institutions scolaires auxquelles tentent de répondre les académies :  une implantation dans des établissements « où la mixité sociale est effective » (GATTOLIN 2016) n’est pas applicable. C’est en effet la géographie des territoires et les flux migratoires qui expliquent la localisation des UPE2A dans les capitales régionales urbaines et/ou au cœur des quartiers défavorisés, eux-mêmes liés aux politiques urbanistes. Pour Merle, cette situation se traduit par un maillage limité, une sectorisation socioéconomique « ethnographique » et « ségrégative » avec des UPE2A globalement situées dans les capitales régionales et dans les quartiers défavorisés : « [G]lobalement, la proportion d’élèves de nationalité étrangère est nulle ou très faible dans une grande majorité d’établissements et dépasse les 20%, 25%, voire 30% dans une petite minorité de collèges situés dans les quartiers défavorisés des grandes capitales régionales. » (MERLE 2012 : 12). Goï et Bruggeman montrent les dysfonctionnements institutionnels qui se déploient sous différentes formes, sur l’ensemble du territoire français, et qui aboutissent à la non-scolarisation/ déscolarisation d’enfants allophones (GOÏ & BRUGGEMAN 2013). Selon Thaurel-Richard et Murat, l’environnement scolaire dépend de la fréquentation effective de l’établissement, elle-même liée aux problématiques territoriales, en particulier dans les grandes agglomérations urbaines où s’observent des profils de collèges très marqués : 


Le collège unique, de fait, rassemble sous ce vocable des collèges très différents, par le public accueilli ou par l’offre de formation. Les différentes typologies des collèges réalisées sur les catégories socioprofessionnelles des responsables des élèves, au cours des dernières décennies, ont fait apparaître des profils différents, allant de « très favorisés » à « très défavorisés », les profils extrêmes étant davantage présents dans les grandes agglomérations urbaines. Les différences de profils sociaux des collèges renvoient en grande partie aux profils des quartiers de résidence des familles ou plus généralement des territoires. (THAUREL-RICHARD & MURAT 2013 : 12)

S’il y a une sectorisation « ethnographique », elle est la conséquence paradoxale de la convergence de choix politiques pluriels avec lesquels l’École doit composer mais qu’elle ne peut modifier – ou à la marge. Il y a en effet en France une corrélation entre le lieu d’habitation (lié au niveau socioéconomique des familles) et la zone de scolarisation des élèves selon les règles établies par la carte scolaire qui compose avec les politiques urbanistes. Celle-ci constitue encore aujourd’hui la principale cause de disparité entre établissements. C’est pourquoi l’institution tente, depuis les années 1980, d’établir une plus forte mixité sociale tout en comblant les inégalités entre élèves. En 1986 (ministère Monory), la suppression de la carte scolaire est envisagée et les zones d’éducation prioritaires (ZEP) sont créées en concertation avec les acteurs locaux (inspections académiques, chefs d’établissements, collectivités). Si en 1988 (ministère Jospin), une politique consensuelle de carte scolaire permet de créer des zones de libre choix, en 1990 (ministère Bayrou), la moitié des collèges peut inscrire des élèves hors secteur. En 1998 cet assouplissement de la carte scolaire renforçant la « ségrégation scolaire » et sociale est dénoncé par le ministère Allègre qui rétablit une affectation automatique de sectorisation9. En 2002, le ministère Ferry et le ministère Fillon réitèrent la désectorisation limitée puis la sectorisation disparaît entre 2007 et 2009 (gouvernement Sarkozy) toujours pour contrer le mécanisme des disparités scolaires et sociales, en favorisant cette fois l’accès des élèves issus de milieux populaires aux établissements les plus prisés.

Les inégalités territoriales ont pour conséquence des conditions scolaires hétérogènes (GATTOLIN 2016 ; ARMAGNAGUE ET AL. 2018). Par exemple, une enquête montre des disparités fortes entre 8 UPE2A et 14 classes ordinaires dans 10 établissements observés : 


les élèves à besoins particuliers sont pris en charge au minimum 9 heures par semaine dans le premier degré et 12 heures hebdomadaires dans le second degré. En dehors des heures passées dans le dispositif, les élèves doivent intégrer les enseignements de leur classe ordinaire. Les applications diffèrent fortement selon les établissements, les circonscriptions et les académies et l’on observe sur le terrain des réalités d’inclusion très diverses. (ARMAGNAGUE-ROUCHER, & RIGONI 2018 : 35)

Par ailleurs, Armagnague et al. soulignent que l’ouverture d’une UPE2A peut se faire avec un temps de latence important, variable selon les académies. Leur fonctionnement étant plutôt autonome, les élèves n’ont pas les mêmes possibilités scolaires et les moyens dans l’accompagnement des familles des élèves sur l’ensemble du territoire sont disparates :


[l]es moyens accordés aux établissements scolaires par les pouvoirs publics ne sont pas suffisants pour mettre en œuvre un accompagnement des familles. En dépit de l’existence du dispositif « Ouvrir l’École aux parents pour la réussite des enfants » initié en 2008-10, puis rénové en 2014 ainsi que des « cafés des parents » organisés par certains établissements, ce sont plus généralement les moyens dédiés à l’interprétariat et à la coopération avec l’ensemble des acteurs éducatifs non scolaires qui font défaut. Ici la médiation scolaire est essentielle, mais elle est dotée de peu de moyens et en présence très inégale sur le territoire (ARMAGNAGUE et al. 2018 : 8-9)

Le rapport Evascol (2020) déplore une « inclusion à géométrie très variable » (Evascol, 2020 : 196) selon les territoires10. Pour Gattolin (2016), la fragilité du dispositif est liée aux moyens alloués et à l’interdépendance entre localisation et projet d’établissement. Avec la loi Haby (75-620 du 11 juillet 1975), une « part d’autonomie pédagogique et administrative »11 est accordée aux collèges qui adoptent leur propre règlement intérieur et leur budget. Depuis 198912  les établissements définissent les modalités de la mise en œuvre des programmes et des orientations académiques dans leur contexte spécifique13. Pour Armagnague et al. « En dépit d’un cadrage national, les aménagements spécifiques pour la scolarisation de ces élèves demeurent variables sur le plan académique, voire départemental, en termes de moyens et d’applications des recommandations des circulaires. » (ARMAGNAGUE et al. 2018 : 6).

Outre l’accès inégal au dispositif UPE2A, les élèves subissent une scolarité contrainte ou entravée. Bruggeman et al. montrent que la scolarisation en UPE2A limite considérablement les possibilités d’orientation des apprenants, aiguillés très majoritairement en lycée professionnel : 


la scolarisation dans un dispositif de l’enseignement spécialisé au collège réduit fortement la possibilité pour les élèves de rejoindre le second cycle général de l’enseignement secondaire. Les élèves sont donc plus ou moins « condamnés » à l’enseignement professionnel, moins valorisé socialement (BRUGGEMAN et al. 2014 : 119).

Guedat-Bittighoffer et Dat observent un échec scolaire important des apprenants allophones au collège « […] sur-représentés dans les filières professionnelles et [qui] connaissent une déscolarisation plus fréquente que les élèves francophones » (GUEDAT-BITTIGHOFFER & DAT 2012 : 85)14. Mendonça Dias (2020) constate sur le terrain que les apprenants non scolarisés avant leur entrée sur le territoire (EANA-NSA) sont rapidement orientés dans les filières professionnelles correspondant à des études courtes :


Les deux tiers de notre échantillon étaient dans leur classe d’âge et les autres avaient une année de plus. Il est paradoxal qu’on les mette davantage dans leur classe d’âge comparé aux 297 élèves régulièrement scolarisés antérieurement et inscrits dans des UPE2A ordinaires, ce qui révèle une volonté d’accélérer l’orientation vers des voies professionnalisantes, du moins, hors des classes régulières du collège. Ce constat va à l’encontre de l’aménagement prévu par la circulaire qui octroie aux élèves peu scolarisés d’avoir un décalage d’âge de deux ans par rapport à la classe de rattachement. (MENDONÇA DIAS 2020 : 57)

L’enseignement à distance lié à la pandémie mondiale de la Covid-19 n’a pas modifié les inégalités. Même, le bilan de l’enseignement scolaire à distance a montré un net décrochage scolaire pour les élèves scolarisés dans des quartiers défavorisés (GOUDEAU et al. 2021). Le niveau scolaire des élèves allophones est souvent défini par la recherche par le niveau socioéconomique et/ou le capital scolaire parental et/ou par la taille de la fratrie. Pour Armagnague et al. (2018), les élèves migrants appartiennent très majoritairement aux classes sociales défavorisées. Pour Primon et al. ces enfants sont issus principalement de familles peu diplômées avec un nombre d’enfants à charge important et sont surreprésentés dans les familles monoparentales ou constituées autrement que par un couple parental : 


Chez les migrants venus enfants ou adolescents, l’absence de diplôme des parents est plutôt la norme avec 66 % de non-diplômés pour seulement 16 % de parents titulaires du baccalauréat ou d’un diplôme supérieur. Les familles sont également de grande taille, avec 70 % des enfants migrants appartenant à des unités familiales composées d’au moins quatre enfants. À l’âge de la scolarisation, les familles monoparentales ou d’une autre configuration que celles composées du seul couple parental et des enfants sont relativement nombreuses (28 %), en particulier parmi les enfants qui ont migré en étant âgés de douze à seize ans (48 %). (PRIMON et al. 2018 : 22)

Dans notre recherche (PREVOST 2021), nous avons repéré divers facteurs concomitants à l’échec scolaire : l’absentéisme récurrent (qui peut être la conséquence du rôle de médiateur linguistique de l’élève), des difficultés d’ordre cognitif occultées par le statut d’allophone, les modalités de la scolarisation antérieure (rythme de la scolarisation et particularités pédagogiques). Ainsi, un apprenant qui a été antérieurement scolarisé en français dans son pays d’origine peut être en difficulté scolaire à l’écrit en France mais un élève peut réussir malgré les conditions familiales et socioéconomiques peu favorables15. Dans notre étude qualitative il apparait que l’échec scolaire est davantage lié aux exigences scolaires, parfois technicistes, auxquelles les élèves ne peuvent pas faire face avec une scolarité raccourcie, surtout s’ils sont EANA-NSA. Aussi l’environnement scolaire (c’est-à-dire les ressources, les pratiques réflexives enseignantes, le co-enseignement) constitue-t-il un levier important pour l’inclusion des élèves allophones et leur réussite scolaire. Intrinsèquement lié au lieu de vie par le jeu de la carte scolaire, l’environnement scolaire a un impact sur l’enseignement-apprentissage avec une interdépendance entre pratique enseignante et réussite scolaire. Cette dynamique peut réduire les disparités entre établissements et les écarts de performance entre apprenants. 

Rendre efficiente la scolarisation en UPE2A

Pour rendre efficiente la scolarisation en UPE2A, il nous apparaît nécessaire de repenser l’allophonie car la désignation détermine (in)consciemment les choix éducatifs. 

La diversité terminologique évolutive présente dans les circulaires institutionnelles est source de confusion. En recentrant, en 2012, la catégorisation du public migrant qui s’adossait aux préoccupations politiques et sociales françaises sur une problématique linguistique, une faille sémantique a été paradoxalement ouverte. Avec le terme allophone, l’institution n’est pas en mesure de rendre explicites les besoins éducatifs particuliers (BEP) hétérogènes des apprenants migrants ni dans leur globalité, ni dans leur spécificité. La recherche a proposé des catégorisations : Armagnague-Roucher (2018) utilise « jeunes migrants » ou « mineurs migrants », Galligani (2012) « les enfants venus d’ailleurs et scolarisés en France », Rigoni (2020) « élèves migrants allophones », Mendonça Dias (2016) « élèves allophones arrivants », Perego (2023) « élèves migrant.e.s plurilingues » – pour ne citer qu’elles – pour qualifier ce public scolaire spécifique. Le choix terminologique, influencé par la discipline scientifique des chercheurs et leur domaine de recherche, ne permet pas de considérer de manière holistique les apprenants.

Repenser l’allophonie c’est également réviser les référents sociolinguistiques. En effet, le contexte socio-économique des élèves allophones n’est pas, en soi, un obstacle à la réussite scolaire. Les familles issues d’un milieu socio-économique défavorisé sans capital scolaire investissent la scolarité de leurs enfants dès lors qu’elles ont saisi les enjeux de l’école et qu’inversement, des élèves issus de milieux sociaux plus favorisés ne sont pas en réussite scolaire (PREVOST 2021). Si la scolarisation antérieure effective et régulière des élèves est un facteur de réussite (toutes origines culturelles confondues), un apprenant qui a appris le français dans son pays d’origine (scolarisation en français, langue vernaculaire, cours particuliers avant la migration…) peut se retrouver en difficulté scolaire en France. De surcroît, certains élèves cumulent les difficultés à s’inscrire dans l’école ordinaire (allophonie et situation précaire, voire marginale ; allophonie et statut de mineur isolé ; allophonie et référents culturels marginalisés ; allophonie et traumas ; allophonie et handicap) qui sont autant d’obstacles pour l’entrée dans les apprentissages et de leurres, notamment selon le lieu de scolarisation. 

On l’a dit, les études montrent des inégalités scolaires qui sont liées aux disparités territoriales. Mais l’environnement scolaire peut aussi être un levier pour la réussite scolaire, au-delà des caractéristiques personnelles des acteurs – et c’est ce qui explique la création des zones d’éducation prioritaire (ZEP) successives16. Plusieurs travaux font état de cet « effet établissement » (DURU-BELLAT 2003 ; VELTCHEFF 2014) difficile à définir de manière exhaustive mais reposant sur le climat scolaire - c’est-à-dire les relations entre pairs, entre élèves et adultes, entre l’équipe éducative et les familles (TRANCART 1993) – et l’investissement des enseignants. Pour que l’environnement scolaire soit perçu comme positif, il doit mener à un sentiment d’appartenance (au groupe-classe, à l’établissement, à la communauté scolaire). C’est un des principaux leviers à l’inclusion des allophones :


Les entretiens montrent qu’une promotion des ressources associatives est réalisée par le professeur référent de l’UPE2A qui fait également le relai entre l’association AFEV et les allophones. Il ressort que les enseignants sont particulièrement investis dans la réussite des élèves selon les propos des élèves et selon les annotations portées sur les travaux d’évaluation (des professeurs B et M). Par exemple, AP22 dit que son professeur de mathématiques le retient après les cours pour lui expliquer ses erreurs (ENTR22-AP22.115) : […] même madame •• elle me prend à la fin de l'heure elle me fait tu m'as bien écrit le Pythagore le Thalès tu l'as bien écrit mais après les calculs que t'as: tu plantes sur ça: c'est petites erreurs {sic} qui me font: (ENTR22-AP22.115). En revanche, les élèves suivis dans [le second collège] mobilisent peu de ressources « hors cours ». (PREVOST 2021 : 309)

De même « l’effet classe » ou « du maître » ont été démontrés (LEROY-AUDOUIN 2016). Les démarches des enseignants, hétérogènes, dépendent de leur formation (initiale et continue), de leur vision disciplinaire et de l’école et des ressources qu’ils peuvent mobiliser dans leur établissement. Une collaboration accrue entre intervenants dans (co-interventions ; collaboration) et hors l’école (enseignants, soignants, éducateurs, travailleurs sociaux, familles, équipes de direction…) permettrait de répondre de manière plus efficace aux besoins pluriels des élèves allophones (besoins linguistiques, scolaires, médicaux, psychologiques, sociaux, numériques …). Dans ce sens, la Circulaire 2012-141 du 2 octobre 2012 ne propose pas de définition du BEP lié à la situation d’allophonie, hormis « des difficultés scolaires ». La scolarisation des élèves allophones nécessite une individualisation – non stigmatisante – de leur parcours personnel et scolaire (ARMAGNAGUE-ROUCHER 2019) en groupes pour favoriser les interactions et les espace-temps d’intéressement (BEHRA & MACAIRE 2018 2021). Comme l’institution ne peut pas résoudre les difficultés qui ne sont pas de son ressort mais qui ont assurément un impact sur l’apprentissage – les conditions de vie difficiles, les traumas liés à la migration (PAPAZIAN-ZOHRABIAN et al. 2018), le « retard scolaire » (MENDONCA DIAS 2020)… – l’inclusion gagnerait en efficience si elle reposait également sur une collaboration accrue entre personnels éducatifs, médicaux et membres associatifs. Tous œuvrent pour la réussite mais ne coordonnent pas toujours leurs actions voire « détricotent » malencontreusement ce qu’un autre intervenant a patiemment exécuté. Parfois, une méconnaissance de référents ethnoculturels peut mettre en difficulté un professionnel éducatif dans la mise en œuvre de son enseignement. Quelquefois, l’accompagnement scolaire d’un bénévole va à l’encontre de la progression pédagogique envisagée par l’enseignant. Ou encore, la méconnaissance d’une situation familiale complexe par l’équipe éducative élargie peut aboutir à des malentendus voire à une décision contreproductive pour la scolarité ou l’orientation de l’élève. Les enseignants référents qui coordonnent les UPE2A font, globalement, le lien entre tous ces acteurs mais leur travail est souvent minoré voire méconnu des équipes éducatives (ARMAGNAGUE-ROUCHER et al. 2018), des travailleurs sociaux et des personnels médicaux. De plus, l’empan temporel qui leur est imparti institutionnellement est un temps d’enseignement. Enfin, les rencontres avec les travailleurs sociaux, les soignants, les familles sont complexifiées par le fait que l’Éducation nationale ne mette pas à disposition de traducteurs pour échanger avec les familles. Ce sont souvent les élèves eux-mêmes qui font office de médiateurs quand les associations qui suivent les parents ne financent pas sur leurs fonds des traducteurs assermentés. Tous ces éléments constituent des freins à l’inclusion et à la réussite scolaire. 

On pourrait également noter l’impact de la gestion du budget des établissements, dont une part est laissée à l’appréciation des équipes pédagogiques et de Direction, notamment en zone REP+, depuis la loi Haby accordant une « part d’autonomie pédagogique et administrative » aux collèges (ATTARCA & CHOMIENNE 2013). Par exemple, après la crise de la Covid, certains établissements REP/REP+, davantage dotés, ont investi dans du matériel informatique à prêter aux familles selon des critères sociaux pour développer la littéracie numérique qui a fait défaut pendant la pandémie et pour pouvoir répondre à l’injonction nouvelle du programme PIX17 et lutter contre la fracture numérique scolaire. Cependant, les besoins en outils numériques – malgré le grand plan pour le déploiement du numérique à l’école du gouvernement Hollande en 2014 et la volonté de généraliser le numérique éducatif dans le primaire, le secondaire et le supérieur (Bulletin officiel n°2, 14 janvier 2021) – ne sont pas, globalement, comblés. Il existe des partenariats avec des grandes entreprises (Agir pour l’École du groupe Dassault, Classes virtuelles financé par la Fondation Cetelem, Écoles numériques en France par la Fondation Orange…) mais ils sont inégalement répartis et interrogent forcément sur les intentions de ces mécènes. Enfin, les difficultés financières rencontrées par les familles, notamment celles en demande d’asile, freinent la scolarisation car les fonds sociaux sont laissés à discrétion des établissements (la décision d’attribution relevant du chef d’établissement après une commission interne), constituent une aide exceptionnelle et varient selon les départements.

Nous pouvons étendre notre réflexion sur l’efficience au sujet de l’inclusivité. Si la réforme Haby du collège en 1975 a impulsé la pédagogie différenciée (MEIRIEU 2020), la politique éducative inclusive date de la loi du 11 février 2005 ayant pour objectif d’ouvrir l’école à tous, sans restriction. Elle a été enforcée par la loi sur l’École inclusive du 26 juillet 2019. Cependant, dans les textes institutionnels, un glissement sémantique entre les modalités de mise en œuvre de l’inclusion scolaire et ses effets s’est opéré, en particulier dans le secondaire où elle se traduit par une affiliation en cours ordinaires accompagnée d’une différenciation laissée au libre arbitre des enseignants encore peu formés (PREVOST 2021, 2023). La formation initiale et continue des enseignants pour prendre en charge les presque 1% d’élèves migrants allophones n’a pas beaucoup évolué, la France peinant à se doter d’un appareil de formation suffisamment efficace (AGACINSKI 2018) malgré l’offre importante, voire la « profusion de ressources pour se former » (DUGUET & MORLAIX 2021 : 133). Perego observe une dichotomie entre terrain et recherche : « d’un côté, inclure les élèves migrant.e.s plurilingues en classe ordinaire est une préoccupation croissante des enseignant.e.s […] ; d’un autre, on observe peu de réelles mutations pédagogiques et didactiques dans les observations de classes » (PEREGO 2023 : 18).  Il transparait une distorsion entre les prescriptions institutionnelles et la réalité des terrains (MACAIRE & REISSNER 2019) qui s’explique sans doute par les dilemmes auxquels fait face l’institution scolaire. Elle doit en effet prendre en compte la diversité des apprenants tout en promouvant un modèle citoyen normé (ARMAGNAGUE 2023). Ainsi, si l’Institution promeut l’inclusion, les conditions de sa réalisation sont encore à améliorer.  

Conclusion 

Le modèle intégratif de scolarisation des enfants migrants allophones émergeant dans les années 1970 a évolué vers un modèle inclusif lié à la notion de besoins éducatifs particuliers (BEP). Cependant, l’accent a été porté sur les besoins linguistiques des apprenants et leurs BEP liés à la migration et à ses conséquences (traumas, perte de statut social, scolarité heurtée, repères culturels…) ont été écartés voire relégués aux acteurs extérieurs à l’École. De ce fait, le regard des enseignants sur les enfants migrants scolarisés en France reste encore trop souvent tronqué, focalisé sur cette question linguistique. Si les besoins linguistiques sont bel et bien là, ils n’expliquent pas les difficultés à suivre une scolarité ordinaire, globalement observées par la recherche en sociologie et en didactique. Aussi la notion d’allophonie gagnerait-elle à être réinterrogée pour considérer de manière holistique ces élèves. De plus, la question – sensible – du financement mériterait d’être posée, qu’il s’agisse du financement de l’empan chronologique (trop court) alloué aux apprenants en UPE2A pour maîtriser la langue de scolarisation (GUEDAT-BITTIGHOFFER et al. 2021), des budgets attribués aux UPE2A et/ou au développement des outils numériques, à la prise en charge du coût de la scolarisation des enfants migrants démunis, du financement de la formation continue des enseignants… La prescription ne suffit pas à la mise en œuvre de l’inclusivité. De surcroît, la collaboration entre les équipes pédagogiques élargies et les intervenants extérieurs à l’École mériterait d’être accrue, en particulier dans les zones prioritaires où sont scolarisés de nombreux allophones du fait du statut socio-économique des familles. Les bénévoles, nombreux, ont tous à cœur de faire réussir les élèves et travaillent pour leur inclusion : l’École devrait se saisir de ces partenaires. Au sein même des établissements, les personnels enseignants auraient intérêt à travailler en commun avec les intervenants hors l’École (soignants, éducateurs, travailleurs sociaux, familles…) pour mieux prendre en charge les BEP dans une École vraiment inclusive. 


Bibliographie

Monographies 

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Articles collectifs 

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Ouvrages 

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Conférences 

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Thèses 

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Textes institutionnels :

Circulaires 

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Circulaire 84-246, 16 juillet 1984, Modalités d’inscription des élèves étrangers dans l’enseignement du premier et du second degrés

Circulaire 86-119, 13 mars 1986, Apprentissage du français pour les enfants étrangers nouvellement arrivés en France

Circulaire 86-120, 13 mars 1986, Accueil et intégration des élèves dans les écoles, collèges et lycées

Circulaire 86-121, 13 mars 1986, Missions et organisation des CEFISEM

Circulaire 90-27, 09 oct. 1990, Missions et organisation des CEFISEM

Circulaire DMP/Cl199-315, 1er juin 1999, Mise en œuvre de la politique d’accueil des primo-arrivants

Circulaire 2002-063, 3 mars 2002, Modalités d’inscription et de scolarisation des élèves de nationalité étrangère des premier et second degrés

Circulaire 2002-100, 25 avril 2002, Organisation de la scolarité des élèves nouvellement arrivés en France sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissages

Circulaire 2002-102, 25 av. 2002, Missions et organisation des CASNAV

Circulaire 2012-141, 2 oct. 2012, Organisation de la scolarité des élèves allophones nouvellement arrivés

Circulaire n° 2014-077, 4 juin 2014), Refondation de l’éducation prioritaire 

Rapports institutionnels 

GATTOLIN, A., (2016). Question écrite n° 21999, Journal Officiel du Sénat, 2 juin 2016.

MEN-DEPP (2022), ministère de l’Éducation nationale-Direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance, Note d’information 22.27, septembre 2022.

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MEN, L’État de l’école (2019), https://www.education.gouv.fr/l-etat-de-l-ecole-2019-11246

MEN Éduscol (2016). Document d’accompagnement pour l’évaluation des acquis du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Éléments pour l’appréciation du niveau de maîtrise satisfaisant en fin de cycle 3, https://cache.media.eduscol .education.fr/file/College_2016/74/4/RAE_Evaluation_socle_cycle_3_643744.pdf

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Lois 

Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées

La loi n°2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République

Loi n°2019-791 du 26 juillet 2019 Pour une école de la confiance


Note

↑ 1 La Direction de l’Évaluation, de la perspective et de la performance répertorie 60 700 EANA en 2016-2017 ; 64350 en 2017-2018 ; 67909 en 2018-2019 (MEN-DEPP, 2019 ; 2020).

↑ 2 Les plus fortes diminutions ont eu lieu dans les académies de Normandie (- 28 %), de Strasbourg (- 26 %) et de Dijon (- 26 %), (MEN-DEPP, 2022).

↑ 3 Institués après expérimentation par les Circulaires 76-387 du 4 novembre 1976 et 77-310 du 1er septembre 1977.

↑ 4 En 1959, dans le cadre de la « réforme Berthoin », le gouvernement français décide de transformer les centres d'apprentissage (CA) en CET (1959 à 1975) qui deviennent lycées d'enseignement professionnel en 1975 (réforme Haby du 11 juillet 1975), puis des lycées professionnels (LP) en 1985.

↑ 5 Elle est consécutive à la loi de 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France au droit d’asile (RESEDA).

↑ 6 Par exemple, l’acronyme ENAF pour « enfant nouvellement arrivé en France » (Circulaire 86-120 du 13 mars 1986) contient l’idée d’un aboutissement dans un déplacement géographique et ne considère aucunement des critères liés à la nationalité ou à la maîtrise de la langue. La circulaire de 1986 distingue ces ENAF des « élèves étrangers […] qui sont nés ou arrivés très jeunes en France » dont les difficultés « doivent être traitées dans le même cadre que les difficultés analogues des élèves français ». La catégorisation semble mettre en exergue des besoins liés à la nouveauté de la scolarisation et prendre en compte l’empan chronologique de celle-ci (tout en normalisant-distinguant les élèves) mais l’acronymisation a effacé l’adverbe nouvellement, donc des besoins liés à la récence de l’apprentissage. L’expression « primo-arrivants » (Circulaire DMP/Cl1 99-315 du 1er juin 1999) recentre à nouveau la question scolaire dans une problématique d’altérité liée à des circonstances géographiques temporaires mais le terme est abandonné très rapidement. En 2002, l’expression a disparu au profit des périphrases « ces enfants dont le français n’est pas la langue maternelle », « sans maitrise suffisante de la langue française ou des apprentissages » qui recentre la problématique sur la langue et les besoins pédagogiques et mettent en exergue l’extranéité inscrite dans un temps récent (nouvellement arrivés en France).

↑ 7 L’Association internationale pour l’évaluation du rendement scolaire (IEA) publie en 1991 une étude internationale menée dans 32 pays par l’OCDE (2001) qui porte sur la compréhension en lecture et qui montre une différence de résultats entre les élèves autochtones (dont l’un des deux parents au moins est né dans le pays de résidence) et les élèves allochtones (dont les deux parents ne sont pas natifs), qu’ils soient eux-mêmes nés ou non dans les pays concernés (Lafontaine, 1996).

↑ 8 Du grec allo signifiant « autre » (άλλο), et phone, indiquant « la langue » ou « la voix » (φωνή), par proxémie avec allochtone (du grec ἄλλος « étranger » et χθών (chthon) « terre », « terre d'ailleurs ») et autochtone (« terre d’ici ») qui rattachent la langue à un territoire.

↑ 9 En parallèle, la politique compensatoire connaît deux regains (en 1990 et en 1997).

↑ 10 Cet état des lieux établi dans cinq académies (Bordeaux ; Créteil ; Montpellier ; Seine-Saint-Denis ; Strasbourg) à partir d’observations dans divers établissements éclaire les leviers et les freins au niveau méso qui confortent les facilitateurs et les obstacles du niveau macro.

↑ 11 L’article 11 du décret 76-1303 du 28 décembre 1976 définit et encadre le champ de l’autonomie des collèges et la note de service du 23 décembre 1983 met en place l’attribution d’une dotation horaire globalisée aux établissements.

↑ 12 La loi 89-486 d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989 (article 18) a été confortée par celle sur l’orientation et le programme pour l’avenir de l’école d’avril 2005, qui introduit le processus de contractualisation sur des objectifs entre l’autorité académique et les établissements. La circulaire 2005-156 du 30 avril 2005 stipule que le contrat d’objectifs doit être établi en cohérence avec le projet d’établissement et sur la base des orientations fixées aux niveaux national et académique. L’autonomie des établissements est donc contrainte par le cadre institutionnel. (VELTCHEFF 2014)

↑ 13 Dans quatre champs : l’organisation pédagogique, la gestion des ressources financières, les moyens horaires et les ressources humaines.

↑ 14 Guedat-Bittighoffer montre par ailleurs que les allophones scolarisés au collège sont massivement orientés par défaut parce que « l’apprentissage du français ne leur permet pas de réussir, mais il les place, au contraire, dans des situations d’échec et d’exclusion en classe ordinaire après un passage (ou non) par un dispositif d’accueil. » (GUEDAT-BITTIGHOFFER 2015 : 84). Elle observe que les « allophones qui arrivent en France avec un niveau A1.1 en français ont besoin de temps pour acquérir des compétences en langue cible notamment de compréhension de l’oral et qu’il ne faut pas les, exposer trop vite à un input qu’ils ne seront pas en mesure de comprendre » (GUEDAT-BITTIGHOFFER 2015 : 101).

↑ 15 Les deux ne sont pas toujours liés même si les familles subissent toujours économiquement la migration avec une perte de statut social.

↑ 16 En alternative des ZEP créées dans les années 1980, le programme RAR (réseau ambition réussite) est créé, remplacé par le programme CLAIR (collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite) lui-même remplacé en 2011 par le programme ECLAIR (pour « écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite » car étendu à 1225 écoles). Ce programme tend à restructurer le collège selon une distinction inédite et tripartite entre collèges RAR, collèges de réseau réussite scolaire (RRS) et collèges ordinaires. Elle a pour conséquence la réduction du nombre d’élèves par classe (2 élèves en moins par classe) et la dotation horaire supplémentaire, modulable et fluctuante – aux effets difficilement observables (Cour des comptes, 2010) – est laissée au libre arbitre des établissements RAR. ECLAIR a été remplacé par la création de réseaux d’éducation prioritaire REP/REP+. Selon la Cour des comptes (2018), la politique éducative prioritaire (REP+ en réseau) reste la seule réponse institutionnelle aux inégalités scolaires, indispensable pour améliorer l’équité et l’efficacité du système scolaire.

↑ 17 Programme d’évaluation des compétences numériques obligatoire et étendu à l’ensemble des collèges à partir de 2023-2024. Chaque élève dispose d’un compte Pix qui le suit tout au long de sa scolarité pour construire progressivement son profil de compétences numériques et préparer sa certification de fin de 3e.


 

Dipartimento di Lingue e Culture Moderne - Università di Genova
Open Access Journal - ISSN électronique 1824-7482